Tan Kozh – Lignages Oubliés

Formé il y a quatre ans par le guitariste et compositeur Sven Vinat, bientôt rejoint par Yamnah, Introspect et Decay, tous membres ou ex-membres de formations émérites de la sphère Pagan Black française telles que Himinbjorg, Belenos, Möhrkvlth ou encore Les Chants de Nihil, Tan Kozh nous a dévoilé, à l’approche du solstice d’hiver, sa première offrande païenne par l’intermédiaire d’Antiq Label, dont l’intégrité et la qualité du catalogue n’est plus à démontrer, avec bon nombre de sorties qui ont trusté sans aucun doute les tops de fin d’année de beaucoup de médias spécialisés.

Ce Lignages Oubliés, premier album du projet, semble vouloir s’inscrire dans une certaine tradition du Pagan Black breton, qui à l’instar de leurs collègues de Belenos, revendique une identité celtique bien affirmée, bien que cette dernière soit défendue à travers le prisme  plus étendu de la culture indo-européenne, les dix chansons composant ce premier opus mettant en avant les différents ponts qui peuvent être faits entre les mythes celtes et la tradition brahamique, berceau des différents peuples de langue indo-européenne tels que les Gréco-latins, les Germains, ou encore les Celtes  bien entendu.

Mais outre les textes et les différentes thématiques abordées ici, c’est avant tout sur le plan musical que Tan Kozh parvient à suivre les traces de ses aînés, sans pour autant rentrer dans le mimétisme et le plagiat outrancier . En effet, les Bretons nous distillent à travers leurs compositions un Pagan Black exalté et solennel dont l’atmosphère brumeuse et mystique nous ramène instantanément à ce qui fait l’essence des autres formations des membres, telles que Belenos et Himinbjorg, bien que l’aspect plus brut et viscéral que l’on peut retrouver sur des albums comme Spicilège (Belenos) ou Golden Age (Himinbjorg) semble volontairement mis de côté ici afin de laisser les sentiments de grandeur et de ferveur ancestrale être les éléments conducteurs de l’œuvre.

Une musique ancrée dans une certaine tradition, certes, mais qui, comme nous l’avons laissé entendre plus haut, ne verse pas dans l’imitation exagérée pour autant, bien au contraire. La musique du quintet possède une véritable personnalité, d’abord de par la mise en avant de cette atmosphère très spirituelle, là où d’autres formations du genre privilégient davantage l’impact et l’aspect guerrier, mais aussi et surtout grâce à la grande diversité d’émotions qui jalonnent les différents morceaux, chaque chanson représentant à sa manière une émotion bien spécifique, la nature des paroles correspondant d’ailleurs à l’atmosphère de la chanson qui y est rattachée.

D’abord, si l’aspect solennel est prépondérant sur l’ensemble de l’album, certains morceaux en particulier en font la part belle, comme le titre d’ouverture « Troisième Fonction » ou encore « Équinoxe », dont le feeling nostalgique et les mélodies imparables contribuent à renforcer l’atmosphère onirique desdits morceaux, alors que des titres comme « Sacrifice », « Ecce Homo » et « Viens à Moi » apportent un véritable plus en terme de lancinance et de contemplation, comme en témoignent les quelques arpèges disséminés dans l’album, et ce, avec toujours cette identité Pagan épique bien affirmée, identité bien évidemment présente dans les paroles avec des références précises prises dans le paganisme indo-européen (« Équinoxe ») ainsi que dans la tradition druidique (« Troisième Fonction », « Sacrifice » ).

Mais, bien qu’étant assez peu axé sur la violence et l’intensité, Tan Kozh se permet toutefois quelques incursions hargneuses et presque punk sur certains morceaux tels que « De Brest à Brest-Litovsk », « …Et La Haine Nous Sauvera Tous » ou bien « Imprécation », qui amènent le groupe sur un terrain beaucoup plus efficace et pêchu, là où les riffs bruts et rock’nroll se marient parfaitement bien au débit des lignes de chants de Sven, très incisives et mordantes, des aspects renforcés par les textes, qui de par leur nature vindicative voire contestataire, peut faire penser à certains jeunes groupes français évoluant dans un registre similaire, comme les Franciliens de Neptrecus sur leur premier album L’Aube du Déclin. En résumé, le quintet joue une musique faisant primer les atmosphères épiques et païennes sur la violence pure, mais sait à certains moments miser sur l’efficacité et l’intensité brute, sans pour autant en abuser à l’excès.

Avec Lignages Oubliés, Tan Kozh signe un premier album très prometteur, qui réussit le pari de respecter la tradition des grands anciens du Pagan Black français tout en développant une musique personnelle, diversifiée et surtout authentique, tout ce à quoi l’on pouvait s’attendre de la part de musiciens possédant un tel pedigree. Il ne reste donc plus aux Bretons qu’à poursuivre dans cette voie-là,  en continuant leur parcours dans le respect de ces trois principes : les yeux grands ouverts, dans le souvenir de leurs pères, et marcher,  droit.

Varulven

8/10

Sortie le 15 novembre 2019

Tracklist : 

1. Troisième Fonction
2. De Brest à Brest-Litovsk
3. Ecce Homo
4. … Et la Haine nous sauvera tous
5. Sacrifice
6. Équinoxe
7. Interlude
8. Viens à moi
9. Imprécation
10. A la Gloire d’Indra

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