BlekkMetal – Un pont de Corbeaux

« When it’s cold, and when it’s dark, the freezing moon can obssess you ! »

Bergen, 13 novembre 2015, 12h, le tant attendu BlekkMetal ouvrait enfin ses portes. Ce festival à édition unique fut bien plus qu’un rassemblement musical car il a su allier avec justesse les plaisirs auditifs aux plaisirs visuels.

BlekkMetal affiche

Indépendamment d’une affiche exclusive et véritable étendard de l’identité musicale metal Norvégienne, le festival accueillait 19  tatoueurs d’origines diverses et de renommée internationale au sein d’une convention tatouage très sombre. Un cinéma d’horreur proposait également la projection de certains films cultes, et une exposition artistique tout aussi sombre permit aux spectateurs de rencontrer les artistes et leurs œuvres.

Je tiens à insister sur le caractère tout à fait unique de cette exposition, dont l’annonce a su résonner dans la sphère metal puisque le controversé mais néanmoins mythique Gaahl présentait pour la première fois ses peintures.

L’idée d’un tel événement a germé dans l’esprit de Jannicke Wiese-Hansen, qui dans les années 90’, a su marquer le Black Metal de son empreinte artistique. Désormais tatoueuse à Bergen, elle a réalisé certains artworks d’albums devenus légendaires notamment pour Burzum, Satyricon, ou Immortal.

Pour revivre le « back to the roots » du Black Metal norvégien et le faire partager aux jeunes générations, elle s’est entourée de figures emblématiques de la scène, telles que Gaahl et Ivar Bjørnson, qui ont fortement participé à l’élaboration de l’événement.

Si le BlekkMetal a tant fait parler de lui, c’est aussi en raison de son line-up élitiste, et même exclusif : Enslaved, Aerternus, Gehenna, Hades Almighty et Gaahl’s Wyrd pour la journée du vendredi, et The C.L.A.S.P Ritual, Old Funeral, Helheim, Kampfar et Taake pour le samedi. La journée du dimanche quant à elle, accueillait uniquement la convention tatouage et l’exposition, mais fut clôturée par le talent d’Einar Selvik Kvitrafn au travers d’une de ses performances solo.

Vous connaissez certainement une majorité des groupes cités, mais sans doute avez-vous tiqué à la lecture des noms de Gaahl’s Wyrd, de Old Funeral et de The C.L.A.S.P Ritual. Le premier est le nouveau projet de Gaahl, dont vous pourrez lire le report plus bas, et le dernier est un tribute band qui regroupe certains grands de ce monde, je vous laisse aller chercher par vous-même ce line-up éblouissant !

J’imagine que ce court prélude a déjà fait naître en vous cette violente frustration d’être passé à côté de quelque chose ! Sachez que moi aussi, car si j’ai participé à ce festival, c’est en tant que bénévole. Mais depuis mon stand de merchandising groupes, j’ai tout de même pu entrevoir une large majorité des groupes. C’est donc avec plaisir que je vous fais partager les prestations à tendance Pagan que j’ai pu voir dans leur intégralité, à savoir celle de Gaahl’s Wyrd, de Kampfar, et la performance solo de Einar Selvik « Kvitrafn », chanteur, compositeur et multi-instrumentiste de Wardruna.

Il régnait une ambiance particulière au sein du festival, à laquelle j’ai eu un peu de mal à adhérer lors des premières heures. J’ai trouvé très étranges ces personnes qui sirotaient une coupe de vin blanc, tout en contemplant de manière faussement experte les peintures, dessins et photos des artistes. Si le Black Metal cultive une image particulière, le public du BlekkMetal m’est apparu comme en étant la quintessence.
Au-delà de mon décalage linguistique et culturel, j’ai compris alors que l’heure avançait que toutes ces personnes étaient simplement rassemblées ici pour l’amour de leur musique et de tout son « spectre » artistique. L’immense respect envers le travail de l’orga du festival, et vis-à-vis des anciens de la scène a installé une certaine froideur au commencement. Mais les norvégiens n’étant pas aussi froids que beaucoup se plaisent à le dire, et compte tenu de leur appétence pour les effets de l’ivresse, les langues se sont rapidement déliées et l’ambiance s’est réchauffée !

Malgré tout, faire un report de ce festival en s’attardant uniquement sur la musique et plus particulièrement sur les prestations pagan ne serait pas lui rendre hommage. Il est nécessaire de mentionner le fait que, au-delà de la musique, le BlekkMetal a également accueilli une convention tatouage tout à fait particulière. Les artistes avaient pour point commun d’avoir de fortes accointances avec la représentation du malin et de la mort, et leur talent respectif s’est déjà fait un nom tout autour du globe. D’ailleurs, nombre d’entre eux n’étaient pas norvégiens. Si je ne suis pas particulièrement familier avec l’univers du tatouage, des noms tels que Nurse Izzy, John Clue ou encore Uncle Allan auront probablement un autre effet sur certains d’entre vous.

Der Todesking

De même, en tant que cinéphile de bas étage, je n’ai aucune idée de la qualité des films qui ont été projetés. Si le cinéma d’horreur me gonfle d’une manière plutôt magistrale, certains venaient de loin pour assister aux séances dans ce cadre unique. Les amateurs de mort (lolilol) ont donc pu apprécier Der Todesking, Eraserhead, Freaks et Necromantisk 1 & 2, comme au premier jour de leur sortie au cinéma.

 

Gaahl’s Wyrd

Les informations à propos de ce nouveau projet sont offertes au compte-gouttes. Avant leur prestation au BlekkMetal, on ne savait pas vraiment quels titres allaient être joués. Il s’est avéré que plusieurs morceaux de Trelldom se sont vus être réalisés pour la première fois en live, ainsi que certains titres de Gorgoroth, notamment le cultissime Incipit Satan, et d’autres chansons de God Seed piochées avec soin dans l’impressionnante discographie de Gaahl.

N’étant pas moi-même un fan inconditionnel du travail de Gaahl, je ne suis pas à le plus à même pour vous révéler tous les secrets de Gaahl’s Wyrd, et je me fie donc à une setlist que j’ai pu trouver sur le net ! Le plus très appréciable de concert fut l’intervention au chant (et à un dérivé de vielle à roue) de Einar Selvik ainsi que Lindy Fay Hella, tous deux membres de Wardruna.

D’un point de vue scénique, rien à dire. Le son a été excellent tout au long du week-end, et il n’est pas nécessaire de rappeler une fois encore le charisme de la bande à Gaahl.

Gaahl's Wyrd

Setlist :

  1. Steg (Trelldom)
  2. Fra Mitt Gamle (Trelldom)
  3. Til Et Annet (Trelldom)
  4. Aldrande Tre (God Seed)
  5. Til Minne (Trelldom)
  6. Sannhet, Smerte og Død (Trelldom)
  7. Lit (God Seed)
  8. From The Running of Blood (God Seed)
  9. Of Ice and Mouvement (Gorgoroth)
  10. Prosperity and Beauty (Gorgoroth)
  11. This from the Past (God Seed)
  12. Incipit Satan (Gorgoroth)
  13. Awake (God Seed)
  14. Carving a Giant (Gorgoroth)
  15. Exit – Through Carved Stones (Gorgoroth)
  16. Sign of an Open Eye (Gorgoroth)
  17. Wound Upon Wound (Gorgoroth)

 

Kampfar

Kampfar

Pour ce concert particulier, Kampfar s’est dépouillé de nombreux artifices auxquels ils ont parfois recours lors de leurs prestations scéniques. Pas de costumes et autres accessoires, uniquement leur musique, et old-school s’il vous plait. Puisque le BlekkMetal fait honneur à la scène des années 90’, Kampfar a proposé un set cohérent, concentré sur leurs premiers albums, malgré la sortie de leur petit dernier, Profan, la veille du concert.

J’espère que vous saurez excuser mon manque de professionnalisme car je n’ai pas de setlist à vous proposer ! Oui, ce concert haut en couleur a eu raison de ma mémoire, alors même que la majorité des morceaux joués ont été piochés dans les premiers albums. Mais voilà, Kampfar a aussi joué du Mock et a accueilli sur scène Thomas Andreassen, ancien membre fondateur qui a beaucoup donné pour le groupe par le passé. Ce fut donc un beau moment durant lequel la reconnaissance et le plaisir de jouer des musiciens étaient palpables.

D’un point de vue musical, à l’instar de leurs albums, Kampfar ne déçoit pas lors de ses prestations live. Leur black metal teinté de paganisme, d’héroïsme et d’histoire installe toujours une atmosphère à laquelle je suis sensible. Si d’habitude Kampfar s’entoure d’artifices visuels, ce concert en fut totalement dénudé, mais les passages tantôt lancinants et tantôt haineux s’entremêlaient avec précision et furent renforcés par la présence scénique bien suffisante du chanteur et du bassiste. Et suite à l’irruption à la guitare de Thomas Andreassen, nous avons tous pu conclure que Kampfar en concert avec 2 guitares, c’est quand même plus classe !

Einar Selvik – Warduna

La journée du dimanche ne voyait se produire aucun groupe. Elle était entièrement dédiée à la convention tatouage ainsi qu’à l’exposition, preuve à nouveau de la volonté de l’organisation de dépasser le simple cadre de la musique.

En revanche, il était proposé aux bénévoles et à certains festivaliers de venir faire le debriefing de ce festival autour d’une bière dans le célèbre bar nommé « Garage ». Fait étonnant, cette réunion se voulait intimiste puisqu’elle n’avait pas été publiquement annoncée aux festivaliers. Uniquement ceux qui avaient fait la démarche de s’intéresser à « l’après-festival » se sont vus délivrer la précieuse information. Moi-même je ne l’ai su que par l’intermédiaire d’une amie bénévole qui avait reçu un planning plus détaillé que le mien ! (Merci à elle, ce fut un moment riche en émotion et en belle musique).

Bref, alors que la soirée avance, Einar Selvik prend finalement place sur la petite scène dans le sous-sol du Garage, et comme à son habitude, commence à ensorceler son public. Promis, cette fois je vais contenir mon admiration pour cet artiste unique, mais je vous ferai néanmoins partager la manière extraordinaire avec laquelle il fait vivre sa musique.

Aujourd’hui en performance solo, chaque annonce de morceau est précédée d’abondantes informations quant à son titre et à sa signification. La démarche est cohérente. Kvitrafn va au-delà de la musique et transmet l’histoire Scandinave et l’interprétation et la signification des runes, cet alphabet ancien dont il est difficile aujourd’hui encore de percer le sens véritable.

Si l’événement se veut très informel, quand Kvitrafn parle, les gens se taisent, absorbés par son charisme écrasant, son calme fascinant et sa capacité à mettre à profit le silence pour nourrir sa musique. Les titres s’enchaînent, Fehu, Helvegen, Völuspá et d’autres encore, je suis assis par terre et profite au maximum de ces 30 minutes de frisson.

Il est toujours très difficile de faire le report d’un concert « Wardruna-related » tant l’atmosphère ritualistique pèse et occupe l’esprit. Rien n’existe en dehors de l’activité sur scène, le temps dévoile toute sa relativité et jamais le monde moderne à l’extérieur n’a été à ce point malmené par l’extraordinaire force du voyage musical et historique qui se déroule à l’intérieur.

Alors que la larme me coule, le rituel se termine, bien trop tôt. Je retiendrai cette phrase d’un spectateur lorsque Einar Selvik propose en plaisantant de jouer la totalité du poème Völuspá (long de 66 strophes) : « I’d pay for that show »

Je vous propose une courte vidéo que j’ai pu prendre durant le concert. J’imagine que le cadrage immonde (oui je regardais la scène plutôt que mon écran !) et la qualité sonore et visuelle vous répugneront très certainement, mais je ne résiste pas à l’envie de partager cette vidéo qui a un certain effet sur moi ! Elle a au moins le mérite de vous donner un léger aperçu de ce qu’est une performance solo d’Einar Selvik. Et oui, ce morceau est bien le même que Vitkispá (premier morceau de Skuggsjá récemment dévoilé par Season of Mist), qui apparait aussi dans la série Vikings et ici et là sur youtube sous le nom de Völuspá.

C’est ici que s’achève mon report de cet événement unique dans tous les sens du terme. Je tiens vraiment à remercier toute l’équipe du BlekkMetal pour m’avoir accueilli comme bénévole, et surtout pour le touchant soutient dont elle a fait preuve envers moi, alors que Paris subissait les attaques terroristes. Ce fut une fin de semaine noire.

 

Wunjo

 

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