Moins d’un an après leur premier EP, les Italiens de Selvans nous replongent dans une atmosphère quasi ésotérique au son de Lupercalia, mené d’une main de maître par le duo que forment Selvans Haruspex et Sethlans Fulguriator. Mais détaillons tout ceci…
Une fois n’est pas coutume, je vais commencer par acclamer le rendu magnifique de l’artwork, réalisé par Diletta d’EBA Art, qui donne, sans même avoir écouté l’album, un parfait avant-gout de l’ambiance musicale de Selvans. Une forêt sombre, protégée d’une lumière intrusive par une végétation quelque peu austère, forme un décor occupé par un personnage, aussi mystique qu’inquiétant, coiffé d’un masque de loup, une double flute dans la bouche. Cette vision inspire un mélange de curiosité et de méfiance, on nous ouvre une porte sur un univers mystérieux que l’homme ne devrait pas fouler, un lieu que la Forêt n’hésiterait pas à défendre quel qu’en soit le prix. Mais heureusement Selvans, dieu de la forêt dans le folklore de la Toscane pré-romaine, nous invite au cours de ce Lupercalia, à fouler un territoire qui ne nous est pas destiné.
L’on pénètre l’orée du bois sur une intro faite de synthé distillant une atmosphère à mi-chemin entre l’enchantement et le malsain, agrémenté de percussions hasardeuses, d’une flute harmonique ultra feutrée et d’une chouette hululant un dernier avertissement. Puis l’instru metal entre en scène apportant de l’agressivité au synthé qui se fait grandiloquent, le rythme s’accélère, une guitare lead fait traîner une mélodie plus catchy sur fond de blast modéré. La forêt vient d’être foulée, nous sommes entrés, les instruments s’effacent petit à petit laissant le synthé en fond et l’envol d’une nuée de corbeaux.
C’est sur cette intro que Selvans enchainera 5 titres plus ou moins conséquents, chacun apportant sa petite originalité à un black metal somme toute plutôt épique par moment. La fin de l’intro embraye directement sur Versipellis et l’on découvre immédiatement le chant aigu et torturé qui nous suivra tout au long de l’album. Et ce premier titre tape dur, les premières minutes s’enchaînent au rythme du blast et des riffs qui te donnent de l’espoir au détour d’un accord pour mieux te le retirer ensuite et te faire replonger illico dans une sorte de noirceur incertaine toujours épaulée du synthé qui se trouve plus en retrait laissant la place à la fureur. Puis le tempo nous laisse souffler sans pour autant se ramollir et la flûte entre en jeu. Mais pas une flûte guillerette, non, une flûte toujours aussi feutrée que dans l’intro qui fait durer ses notes aiguës en parfaite opposition avec le blast qui revient à la charge et après dix minutes le premier titre se termine et nous laisse dans cette ambiance sombre, non dénuée d’espoir, mais un espoir qui brille loin, faiblement et à travers des branchages peu accueillants.
Et comme je le mentionnais plus haut, chaque titre apporte son petit truc alors je me dois de parler du petit pont qui sent bon l’Italie sur O Clitumne ! Après plusieurs minutes d’une recette qui a fait ses preuves dans le premier titre, tout se calme et une mandoline fait son entrée avec un jeu typiquement à la napolitaine, vous savez la seule bande son qui vous vient à l’esprit lorsque vous entendez cette suite de mots clefs « Sicile ; Soleil ; Huile d’olive ; Mafia ». Vous l’avez ? On rajoute à ça quelques sonorités d’accordéon et si vous ne doutiez pas d’être en forêt, vous ne doutez maintenant plus d’être en Italie !
Une autre bizarrerie qui, elle, m’a un peu sorti du délire, c’est cette mélodie très pompeuse au synthé lors d’un break de Hirpi Sorani. Je la trouve très proche, pour les premières notes en tout cas, de White Wedding de Billy Idol qui n’est absolument pas dans le même registre… Alors du coup ça fait bizarre.
De toute manière le coup de maître arrive à la fin et représente l’ensemble de la chanson N.A.F.H. . Ce titre communique une puissance affolante ! La faute à ses interludes calmes au synthé sur fond de tambour chamanique aux sons des lamentations du chanteur qui chouine. Oui, il chouine, dit comme ça, ça fait nul mais en vrai ça rend un mélange de tristesse et d’impuissance qui explose littéralement avec le blast et l’arrivée du chant clair plein de convictions ! Et on ressort de ces 17 minutes marqué par une émotion vive et forte qui palpite dans nos veines.
Ce Lupercalia hisse Selvans au rang de ces artistes qui savent ce qu’ils font, et qui le font bien. Le rythme est soutenu tout au long de l’album mais n’épuise jamais l’auditeur, l’instru folk est réduite à l’essentiel et impacte de par sa pertinence, et surtout, ils ne s’enferment pas dans un style aux limites immuables. Le court outro ultra Jazzy de Scurtchin au piano en est la preuve.
Bref, Selvans est assurément un groupe à suivre par la suite !
Grymauch
NOTE : 8/10
Tracklist :
- Matavitatau
- Versipelis
- O Clitumne !
- Hirpi Sorani
- Scurtchin
- N.A.F.H
Sortie : 19 Octobre 2015
Lien du groupe : Facebook, Bandcamp, Site Officiel.