Si l’on penche d’un peu plus près sur les différents festivals metal qui se déroulent chaque année dans l’hexagone, le Hellfest apparaît tout de suite comme la référence numéro 1 aux yeux de beaucoup, et ce, malgré les nombreuses critiques qui fleurissent depuis plusieurs années à l’encontre de l’événement lancé en 2006 par Ben Barbaud.
Pourtant, depuis maintenant 12 ans, un autre festival situé dans la même aire géographique a su profiter de l’essor du Hellfest pour se développer petit à petit, jusqu’à être considéré par beaucoup comme “le petit frère du Hellfest” : je parle bien sûr du Motocultor Festival, festival se déroulant tous les ans depuis 2007 à St Nolff, une petite bourgade située non loin de la ville de Vannes, en Bretagne. A l’image de son mentor, le Motocultor s’est engagé année après année à fournir des affiches à la fois éclectiques et aguicheuses, mais tout en conservant ce qui petit à petit avait disparu au Hellfest, et cela au grand dam des festivaliers : un festival possédant un site assez sobre, sans trop d’animations extérieures, que la musique et les concerts, et surtout un événement qui demeure à taille humaine, où circuler librement ne se transforme pas en véritable épreuve de survie et où l’on peut pleinement profiter des concerts de la journée tout en conservant un peu d’espace autour de soi.
Personnellement, j’avais déjà eu l’occasion de me rendre à St Nolff il y a deux ans, pour une édition fort agréable, avec de nombreux concerts de grande qualité, comme ceux de Bloodbath, Opeth, Insomnium, Possessed, Obituary, Vital Remains, Paradise Lost ou encore Primordial. Mais étant plus habitué (et amateur) des festivals thématiques possédant une ligne artistique précise dans leur programmation, je n’avais pas prévu de remettre un jour les pieds dans le Morbihan.
Cependant, l’organisation d’une soirée folk et musique celtique en guise de “warm-up”, avec notamment des noms comme Stille Volk, Corvus Corax ou Alan Stivell, mon emploi du temps disponible ainsi que la possibilité de m’y rendre en tant qu’accrédité presse changea la donne, et je décidai donc de retourner au Motocultor pour la 2ème fois. De plus, l’édition de cette année comportait également quelques beaux noms, notamment des groupes comme At The Gates, Solstafir, Harakiri For The Sky, Mgla, Pensées Nocturnes, Hypocrisy ou encore Watain, ce qui nous assurait une programmation assez copieuse.
Après un voyage encore une fois mouvementé, j’arrive sur le site du festival environ un quart d’heure avant l’ouverture. Si récupérer mon pass presse fut assez tranquille, l’accès au camping l’est beaucoup moins, avec une attente d’environ une heure en raison de l’immense queue qui traverse le parking (un phénomène que l’on retrouvera pour pas mal d’autres situations malheureusement). Après avoir longuement attendu, j’installe enfin ma tente et me dirige vers l’entrée du festival. Cette longue attente me fit donc rater le premier groupe de la soirée, à savoir les Allemands de Corvus Corax.
Perdu pour perdu, j’en profite pour (re)faire un tour complet du site. Globalement, ce dernier est à peu près identique à ce qu’il était il y a deux ans, avec deux grandes scènes, la Dave Mustage et la Massey Ferguscène, qui se trouvent être couvertes (ce qui sera fort profitable, nous le verrons), et une plus petite, la Supositor Stage, située quant à elle en plein air et jouxtant la forêt. Nouveauté de cette année, pour être cohérent avec la soirée celtique, l’orga a installé une mini “fête médiévale”, avec quelques stands proposant des choses que les aficionados de Compiègne ou Provins reconnaîtront aisément.
Bon, étant plutôt un habitué des fêtes médiévales, j’ai quand même été très déçu du peu de stands présents, et de leur contenu assez limité, je pense qu’au vu de la superficie du site, un panel de stands plus variés aurait pu être proposé. C’est vraiment dommage pour le coup.
En ce qui concerne le reste en revanche, ce fut assez semblable à ce que j’ai vu il y a deux ans, aussi bien du côté positif que négatif. D’abord, le market, qui bien que petit, proposait des stands assez variés avec CD, Vinyles, T-shirts, Patchs et accessoires en tout genre. Etaient notamment présent différents labels et distros tels que LADLO Productions, Antiq Records, Adipocere et d’autres. Enfin, le secteur nourriture a lui aussi connu quelques changements, avec l’installation de food trucks proposant différents types de nourriture, japonaise, libanaise, locale, en plus des traditionnelles frites, galettes, saucisses, etc. Malheureusement, la nourriture sera encore une fois un gros point noir, surtout au niveau du prix : si j’ai pu profiter d’un peu plus de variétés cette année, je n’ai jamais vu de la nourriture aussi chère en festival, c’était à la limite du vol, surtout vu les mets proposés (une barquette de frites avec deux saucisses, ça ne vaut pas 7 euros, désolé). Mais là n’est pas le plus important, car si nous sommes là, c’est avant tout pour voir les groupes, chose que je vais faire de ce pas en allant me placer sous la Dave Mustage pour assister au concert des Pyrénéens de STILLE VOLK .
Car malgré mon affection pour la scène Pagan/Folk de chez nous, c’est seulement cette année que je me suis véritablement plongé dans l’œuvre de Stille Volk, avec notamment la sortie du nouvel album Milharis il y a peu de temps. Proposant un habile mélange entre musique médiévale, folk celtique et folk traditionnel occitan, Stille Volk nous dépeint depuis plus de 20 ans son univers sylvestre et tellurique où se côtoient mythes des Pyrénées, esprits des éléments et sorcières qui hantent les vieux villages occitans. Si ma connaissance studio du projet est assez maigre, je sais un peu plus à quoi m’attendre en version live, ayant déjà vu le groupe lors du Cernunnos Pagan Fest de 2015.
Je sais à quoi m’attendre, oui, enfin pas tout à fait, puisqu’à l’image de son parti pris studio depuis La Peira Negra, la bande à Lafforgue et Roques décide de privilégier ce soir sa facette plus sombre et intimiste, avec des morceaux mettant en valeur une ambiance de cérémonie païenne mystique et de vieux contes occitans racontés au coin du feu un soir d’automne. Cela se ressentira surtout sur les morceaux du dernier album tels que “Parmi Les Monts Oubliés”, “L’aurost Lunaire”, “La Grotte du Jadis” ou encore “Incantation Mystique”. Le duo Lafforgue-Roques, de par leurs voix chaleureuses et solennelles, font ce soir office de conteurs, nous racontant les faits et les aventures des différents esprits et divinités des Pyrénées.
Pour les morceaux les plus enjoués, Stille Volk nous gratifia tout de même de “Maudat”, “Joglar” ou encore l’incontournable “Banquet”, tiré de mon album préféré Nueit de Sabbat. On regrettera cependant l’absence d’un “Danse de La Corne”, qui aurait augmenté les chances de voir la foule se transformer en un charivari géant, comme ce fut le cas en 2015. Mais inutile de râler, car les Occitans nous ont offert un show rempli de mysticisme et d’intimisme, qui a réussi à nous envoûter en ce début de soirée. Buvons !
J’ai tenté d’aller voir par la suite Alan Stivell, qui n’est autre que l’un des pionniers du renouveau de la culture celtique en Bretagne et en France. Mais malheureusement, au bout de quelques morceaux, j’ai commencé à trouver cela un peu répétitif, et ce malgré le mélange musique celtique, musique du monde et prog 70’s assez intéressant il faut le dire. Bon, j’ai tout de même pu profiter de “Tri Martolod”, donc c’était positif en soi. J’étais par contre très impatient de découvrir en live le projet EXCALIBUR, qui fête ce soir ses 20 ans d’existence. Formé en 1998 par le musicien nantais Alan Simon, cette entité musicale a sorti plusieurs albums-concept gravitant autour de la légende arthurienne et des mythes celtiques, l’objectif étant de raconter ces histoires à travers un opéra rock mêlant à la fois la musique celtique, l’opéra et le rock progressif des années 70.
Un programme bien ambitieux me direz-vous, si ambitieux qu’il obligea son géniteur à faire appel à toute une pléiade d’invités, issus de prestigieuses formations de musique celtique et de rock prog, telles que Tri Yann, Dan Ar Braz, Alan Stivell, Lunasa, mais aussi Yes, Jethro Tull, Saga, King Crimson et tellement d’autres qu’il serait bien trop long de tous les nommer. Le show de ce soir est divisé en deux parties, la première partie du concert étant une sorte de best of retraçant toute l’histoire du projet. Après une courte introduction faite par Alan Simon et sa famille sur la genèse du projet et sa joie de le présenter ce soir au Motocultor, Roberto Tiranti, chanteur du groupe de Power Mélodique Labyrinth, entre sur scène afin de commencer cette véritable pièce de théâtre. Car oui, le déroulement de la prestation du groupe est quasi similaire à celui d’un opéra, chaque chanson constituant un acte différent, introduit par une petite histoire d’Alan Simon à propos de la légende dont parle la chanson en question, ces chansons au cours desquelles un invité spécial faisait son apparition pour chanter ou pour jouer d’un instrument.
Et qui dit différents actes et différents invités dit également différentes ambiances musicales, chaque invité apportant avec lui sa touche personnelle à l’ensemble de la troupe. On a alors droit à des morceaux folk celtique dansants aux immersifs pavés prog 70’s (j’ai particulièrement apprécié la reprise du “In The Court of The Crimson King” de King Crimson, qui m’a complètement transporté) en passant par les morceaux plus intimistes et mélancoliques et les ballades, le tout complété par une multitude d’intervenants tels que des figurants, des danseurs, des sonneurs de cornemuses, un bagad, une danseuse solo, de la pyrotechnie, enfin bref, tout ce qu’il faut pour faire de ce show une véritable épopée. Sur la forme et une partie du fond, il y avait vraiment beaucoup de points communs avec des formations opéra rock/metal telles que Avantasia ou Ayreon, ce qui m’a beaucoup plu, ainsi que toutes les composantes musicales que j’ai relevées précédemment, me faisant vivre un véritable voyage musical au cœur du monde arthurien.
Malheureusement, il y aura un gros, un énorme point noir au cours de cette soirée, qui est d’ailleurs le même qui me chiffonne toujours avec les opéra rock, prog, metal ou ce que tu veux : outre le côté “toujours plus” de ce genre de spectacle qui peut devenir indigeste, c’est la durée excessivement longue du concert (trois heures !!!), qui au bout du compte, rend le propos très difficile à suivre jusqu’au bout, si bien qu’après avoir profité du premier concert, j’ai regardé le quart du deuxième en étant déjà à moitié endormi, ce qui me fit quitter le site du festival pour aller me reposer dans ma tente. En bref, Excalibur aura réussi au cours d’une même prestation à me fasciner autant qu’à m’écœurer à cause de la longueur interminable de cette dernière. Et ça, c’est un sacré défi !
J’ai quand même tenté d’aller voir Eluveitie, qui est un groupe qui m’a véritablement marqué lors de ma découverte du Metal lorsque j’avais 17 ans. Mais non, rien à faire, j’ai trouvé ça tellement creux et vide que je suis parti au bout de trois chansons. Franchement, quand je pense ce que ce groupe représentait pour moi à mes débuts, ça me fait mal au cœur. Sincèrement. Enfin, tout change, après tout.
C’est donc ainsi que se termine cette soirée celtique du Motocultor 2019. Si l’initiative était plutôt alléchante, je ressors de là un peu mitigé, et ce en raison du peu de groupes vus (deux sur cinq) et des animations médiévales un peu trop légères à mon goût. Enfin, ne boudons pas notre plaisir, j’ai quand même assisté à deux bons concerts (même si une heure suffisait amplement pour Excalibur je pense). On regagne doucement sa tente, afin de se reposer pour cette longue journée de vendredi qui nous attend…