Morrigan et Yroenn se sont rendus au tant attendu Hellfest 2022 le premier week-end, ils livrent leurs impressions de ce festival XXL.
Yroenn : Si en juin 2019 on nous avait annoncé que nous aurions dû attendre trois longues années avant de pouvoir reprendre notre shot annuel de Metal, personne n’y aurait crû… Et pourtant c’est ce qui est arrivé (Covid et consorts, je ne vais pas vous refaire l’historique), et nous voici donc de retour à Clisson Rock City avec un énorme manque de gros son, de beuveries entre amis et inconnus, ainsi que de mélanges sociaux en tous genres à combler !
JEUDI 16 JUIN
Mais arrivé en milieu d’après-midi dans la file d’attente permettant de récupérer le précieux bracelet, nous n’allons pas pouvoir fouler les terres sacrées de ses scènes avant demain. Cependant, après avoir constaté que l’organisation autour des deux nouveaux parkings en amont et aval du site est encore très perfectible (pas assez de navettes essentiellement), il nous restait à découvrir les nouveautés du Hell City Square (peu nombreuses en fait) et surtout du Metal Corner qui a changé de peau pour l’occasion : exit le chapiteau et le grand hall prenant des allures de boîte de nuit après les lives, place à une grande terrasse donnant sur une scène ouverte plus accessible, regroupant en un seul lieu les activités extra-site. C’est ici que je profiterai de mes premiers concerts : un cover band mené par Chef [Etchebest] & His Gang fort sympathique, un Nanowar Of Steel fidèle à sa folle réputation qui nous arrose de hits déjantés, et surtout un Frog Leap survolté dont l’apéritif de ce soir sera plus long que le plat de résistance de demain (ils sont aussi prévus sur la Mainstage à 11H). Une entrée en matière largement satisfaisante en ce qui me concerne !
[Ce qui n’était pas prévisible, c’est l’écrasante chaleur qui nous a assommés pendant toute la durée du fest, m’empêchant de faire des nuits de plus de 4H…]
Morrigan : Cela faisait un moment qu’on l’attendait cette fameuse édition du Hellfest, avec les places en poche depuis maintenant 2019, on commençait à sérieusement trépigner d’impatience de venir, nos obligations ne nous autorisaient à venir seulement le samedi, on en a profité un max sur un jour en subissant le soleil de plomb et en complétant notre bronzage (ou coups de soleil, au choix). Si je n’étais plus venue sur le festival, c’était surtout à cause du bien trop grand nombre de festivaliers présents sur le site, rendant toute circulation difficile et créant des files d’attente interminables partout. Ce dernier point a été largement amélioré cette année (merci le rechargement en ligne cashless!), le trop grand nombre de personnes en revanche… C’est tout de même toujours un plaisir d’arriver et de faire son petit « tour du propriétaire », aller voir les nouveautés, les nouvelles œuvres disséminées partout sur le site, nouveaux aménagements. On a apprécié la grande quantité d’assises ajoutées, ou les brumisateurs par exemple.
VENDREDI 17 JUIN
Yroenn : Vendredi, début officiel de l’offensive ! Et comme un rappel de la soirée de la veille, Frog Leap vient en remettre une (petite) couche devant une fosse miraculeusement bien remplie étant donné l’heure matinale ! La bande à Leo Moracchioli méritait clairement un meilleur créneau que celui-ci vu son succès. On va ensuite enchainer sur un Necrowretch destructeur sous la Altar puis un soporifique Numen sous la Temple, le temps de constater que le sol a été goudronné. Une idée qui tombe à pic face à ce thermomètre explosé, nous évitant d’étouffer dans la poussière en permanence ! Sur la Mainstage 2, Leprous nous servira un set impeccable et envoûtant comme à son habitude, avant d’aller constater que la réputation de Seth sur scène n’est pas usurpée, décorum et apparat de circonstance pour une atmosphère lugubre bien installée. Opeth n’aura pas le même effet que de coutume sur le fan que je suis (la chaleur peut-être) même si la setlist regorge de classiques, alors qu’au contraire la joie de vivre des bedonnants de The Offspring réveillera sans mal l’adolescent qui somnolait en moi !
Une bonne grosse pause s’impose avant d’aller se démonter les cervicales sur At The Gates à l’ombre de la Altar, encore des anciens qui ne m’ont jamais déçu sur scène et tiendront une nouvelle fois toutes leurs promesses. Le gros morceau du jour est Deftones pour ma part, libérant totalement l’ado réveillé tantôt par les Californiens! La setlist est une mine de hits absolus qui donneront beaucoup de difficultés à Chino, peinant souvent à reprendre son souffle, mais jamais avare en énergie scénique ! Un concentré de rage juvénile qui a flingué mes mollets de quarantenaire ! Il me reste un peu de temps pour aller constater à quel point Death To All est un hommage à la hauteur du mythe, avec son line up de rêve et un frontman de Cynic bluffant de réalisme, alors que la prestation de Mayhem ne me fera pas autant rêver, la faute en majeure partie à un son particulièrement désagréable (récurrent sous la Temple malheureusement)…
SAMEDI 18 JUIN
Yroenn : Samedi, température encore à la hausse avec une pointe record à quarante putains de degrés !! Mais comme je suis un peu taré, j’ai tout de même été souffrir devant la Mainstage dès 10H30 pour Titan qui le méritait bien, un incontournable du heavy français sur disque comme sur scène. The Dead Daisies ayant décommandé à la dernière minute, c’est un excellent coverband de System Of A Down (on les aura eus finalement !) baptisé Soldier Side qui nous servira un best of des deux premiers opus en guise de compensation, largement validé par le public. Après avoir goûté à une Valley blindée pour le passage de Nergal avec Me And That Men et sa dark country, je vais m’échauffer la nuque sur Xentrix et son thrash old school assez progressif, efficace à souhait. En revanche, je me suis profondément ennuyé sur un Einherjer au tempo monotone, que Loudblast me fera le plaisir de bousculer par la suite histoire de se réveiller un peu ! Encore une formation solide et imperturbable, jamais décevante en concert.
En fait je suis resté planté entre la Altar et la Temple jusqu’au soir passant d’un heavy/thrash plutôt cool avec Exciter à un Taake surprenant pour quelqu’un qui comme moi n’est pas plus porté sur le black que ça, plutôt friand du thrash old school de Flotsam & Jetsam qui m’a totalement convaincu. Si le show d’Ensiferum a fini de me convaincre que ma période folk pouêt pouêt était très loin derrière moi, Sepultura aura bien l’effet inverse : les Brésiliens ont littéralement retourné le goudron fraîchement coulé de la Altar en nous servant la crème de leur discographie, devant une fosse saturée mais aux anges ! Histoire de se poser un petit peu, prenons une bière au bar de la Mainstage 2 en regardant tranquillement les papys de Deep Purple (Gillan, prends ta retraite !) servir eux aussi leurs classiques dans le plus grand calme, suivis de près par Ghost qui n’aura pas autant bouleversé sa mise en scène qu’à son habitude entre deux albums [comparé au show donné au Zénith de Nantes le 18/12/19] et n’attendra pas non plus la grandiloquence du show donné sur la scène voisine en 2016. Ceci dit, c’est toujours un plaisir à regarder et à écouter ! On termine cette journée avec un événement exceptionnel : la reformation de Windir servie par Vreid le temps d’une unique tournée, rejouant le mythique 1184 dans son intégralité ! Si le son a mis deux titres à s’équilibrer, la prestation n’en pâtira nullement et se dégustera du début à la fin, avec une reprise de « Paint It Black » aussi jouissive que chaque titre de l’album ! Des étoiles plein la tête avant d’aller se coucher, que demander de mieux ?
Morrigan : Frais et déterminés, nous arrivons sur le site vers 11h… l’heure de la première gorgée de bière, nous faisons un petit tour pour repérer les nouveautés. Nous commençons les concerts en beauté avec une petite touche de délicatesse et d’intelligence, et nous rendons sous la Altar sous un soleil de plomb pour assister au concert de Brutal Sphincter. On a beau dire mais du goregrind en bonne et due forme, ça fait toujours plaisir, j’ai particulièrement apprécié les échanges entre les deux chanteurs qui rendaient le show plus dynamique et ce malgré un son brouillon, mais bon ne soyons pas trop durs, c’est aussi le style qui veut cela… Nous nous mettons ensuite en quête de quelque pitance que nous trouverons à la Warzone… erreur fatale puisque s’il y avait bien un concert que je ne voulais pas louper, c’était bien celui d’Aktarum qui jouaient pour la première fois dans notre belle région… sauf qu’on a du coup oublié qu’il faut pas mal de temps pour traverser le site avec toute cette foule… du coup on a loupé une bonne partie du set. Un peu dépités, on assiste donc à la fin du show sous une tente déchaînée. De ce que j’ai vu, le groupe a tenu ses promesses, quelle ambiance pour un set donné vers 12h ! De la régie, le son était très correct mais l’on m’a dit que le son plus devant était exempté de samples, bien dommage pour un groupe de folk… On enchaîne avec Rectal Smegma mais là j’avoue que je m’attendais à plus « fun » pour du goregrind, le groupe a livré une prestation très convenue qui m’a un peu ennuyée je dois l’avouer. Un petit tour à la Warzone ensuite pour voir un peu Guerilla Poubelle et se sentir rajeunir car même si leur style n’est vraiment pas mon style de prédilection, leur concert était fort bien mené avec beaucoup d’envie malgré le soleil qui donnait sur la scène et des conditions franchement difficiles et pour les groupes et pour le public, le côté engagé du groupe est toujours aussi appréciable. Nous retournons ensuite sous la Temple en quête d’ombre mais pas que ! Einherjer se produisent et si j’écoute très peu le groupe on m’en avait beaucoup parlé et je voulais voir ça de mes propres yeux… Un son abominable, et un set très déstabilisant qui n’avait rien de pagan à mon sens m’ont fait quitter la tente de manière prématurée, ce groupe n’est pas fait pour moi. On enchaîne avec Alestorm sur la Mainstage 2. Je m’étais jurée de ne plus aller voir ce groupe en live mais il ne faut jamais dire jamais, la curiosité a pris le dessus (et je n’avais rien d’autre à voir à ce moment). Bon… ça joue toujours aussi bien, la bonne humeur est là et les canards géants aussi, malgré nous on connaît quasiment toutes les chansons par cœur ou au moins les refrains mais on reste bien loin des débuts du groupe ! Le moment arrive ensuite de rejoindre la Temple pour revoir Ensiferum pour la énième fois, si la différence entre nouveaux et anciens titres se fait cruellement ressentir (oui je fais partie de la team « c’était mieux avant » mais bon le petit « Token of Time » faisait quand même bien plaisir !), le groupe livre cette fois une prestation de qualité malgré un son très plat avec des samples trop peu mis en avant qui rendait parfois la reconnaissance des morceaux difficile pour les non-initiés, c’est toujours aussi festif et fédérateur mais il faut aimer le pouet pouet, mention spéciale au nouveau claviériste qui fait également du chant, c’est vrai que ça fait bizarre au début ce chant heavy, mais ça colle avec les nouveaux morceaux et super prestance de ce monsieur ! On enchaîne ensuite avec Mono & The Jo Quail Quartet. Pas fan du tout du groupe sur album, on m’a bien vendu leurs prestations live et quand j’ai vu que le Jo Quail Quartet accompagnerait Mono, je me suis dit que ça valait le coup d’aller voir… c’était sans compter sur le son immonde (pourtant pas fort mais très brouillon) qui nous a gâché la prestation durant laquelle nous n’avons pas entendu du tout le quartet… vraiment dommage car il s’agissait d’une prestation unique mais que l’on n’a pas pu apprécier à sa juste valeur… On a voulu aller voir Sepultura mais impossible de s’approcher, on est passé à deux doigts du mouvement de foule tellement il y avait de gens irrespectueux (quelle idée de faire jouer Sepultura sous tente aussi), on a donc déclaré forfait. On finit sur Ghost qui m’ont confirmé que si j’adorais le groupe sur ses premiers albums, ce n’est plus du tout le cas. Si on a bien vu l’immense maîtrise du groupe sur scène, on a aussi vu que tout était bien trop convenu avec un manque total de spontanéité et puis on ne va pas se mentir… Ghost n’a plus rien de metal ni même de rock’n roll… Nous rentrons donc un peu déçus que le feu d’artifice ait été annulé pour cause de sécheresse mais au moins on n’a pas attendu pour regagner le parking en navette, une bonne chose pour nos petites jambes qui commençaient à sérieusement se fatiguer !
DIMANCHE 19 JUIN
Yroenn : Dimanche est déjà là, et l’orage de cette nuit nous a gratifiés d’une perte salvatrice d’une dizaine de degrés ! De quoi commencer (tardivement) la journée sous de meilleurs auspices en compagnie de Battle Beast. Et si leur power metal dansant a tendance à me rebuter, quelle putain de voix ! Noora nous donne la leçon vocale N°1 du jour avec son coffre et sa justesse diabolique (comme sa tenue de scène), suffisant pour me scotcher à la scène jusqu’à la fin. Leçon N°2 : Doro qui, du haut de ses 58 ans, nous sert une prestation vocale puissante et sulfureuse sur fond de heavy/hard imparable taillé pour le live ! Incroyable ! Leçon N°3 : Tatiana, qui a été capable par sa justesse et sa rage de me faire rester sur un concert de metalcore jusqu’au bout ! Clairement la numéro 1 de ce genre d’exercice avec Jinger à l’heure actuelle ! Entre-temps, je suis aussi passé à la Altar saluer nos gloires locales de Regardes Les Hommes Tomber avec un Thomas plus habité que jamais, et j’y retournerai pour un autre numéro 1 dans son registre : Gaahls Wyrd ! Ce type ne vit clairement pas dans le même monde que nous, tant ses apparitions scéniques semblent venir d’ailleurs ! Borknagar aurait pu avoir une aura aussi marquante si seulement l’ingénieur du son s’était rappelé que la compréhension du chant était primordiale dans leur musique, en particulier sur les derniers albums… Heureusement que les musiciens compensaient par leur enthousiasme ! Retour au soleil et au bar de la Mainstage 2 pour observer Down de loin et constater que Phil a l’air relativement sobre cette fois : un peu court sur le souffle, mais meilleure tenue générale de voix sur tout le set, ça fait plaisir. Ceci avant ma pièce maitresse de la journée : KoRn ! Eh oui, mes mollets vont encore prendre cher sur cette setlist qui dégueule de hits absolus encore une fois, et les musiciens semblent de plus en plus heureux d’être là à chacune de leurs venues (au regard de leur passif avec le fest, ça se comprend aisément). Combo gagnant ! Pour finir (en ce qui me concerne), je n’attendais rien de moins que la perfection de la part de notre ami Devin Townsend avec sa setlist « by request » qui honorera nos oreilles avec le fin du fin pioché dans toute sa carrière agrémenté de son humour habituel, clôturant même par un « Love » exhumé du cercueil de Strapping ! Quel final délectable pour un week-end n’ayant eu comme seul point noir une température dévastatrice !
Yroenn : Oui, vous l’avez compris, j’ai osé faire l’impasse sur Gojira, Running Wild ou encore Killing Joke que j’avais pourtant très envie de voir, mais un mal de crâne dû à la fatigue et à la chaleur m’a fait déclarer forfait plus tôt que prévu, me forçant à plier bagage avant la fin des hostilités… Pourtant, et ça aussi vous l’avez compris, je ne regrette absolument rien de ces quatre derniers jours ! Il est certain que l’absence d’édition sur les trois années passées est pour beaucoup dans le fait de puiser jusqu’à la dernière goutte chaque moment de bonheur dans chaque minute de ce week-end, faisant fi des désagréments dont tout le monde a souffert dans le même temps. Sur ce sujet, on peut féliciter l’organisation globale pour son efficacité, l’eau n’ayant jamais manqué ni sur le site ni sur le camping (jets d’eau réguliers devant les Mainstages, canon à brume entre les deux, robinets présents partout pour les gourdes finalement autorisées, et surtout aucune pénurie); merci aussi aux secouristes qui n’ont cessé de faire des allers-retours en ambulance pour récupérer les moins résistants à la chaleur ! Hellfest, je me demandais si je n’étais pas trop vieux pour ces conneries, surtout qu’après deux grosses nuits je sens encore mes courbatures (je ne sais pas m’économiser)… Le fait est que je regrette déjà de ne pas pouvoir participer au second week-end, et que j’attends déjà impatiemment de voir ce que vous nous préparez pour 2023 ! Alors à tous, rendez-vous l’année prochaine !!
Morrigan : Tout comme Yroenn, je me suis posé cette même question : je suis trop vieille pour ces conneries, et pourtant on revient toujours avec plaisir (pitié les gars réduisez la jauge, ce sera tout pour moi), et comme je disais à d’autres, on a quand même la chance d’avoir le Hellfest à côté de chez nous, avec un aménagement de site et un cadre exceptionnels !
Un grand merci à Yroenn qui a accepté de me prêter main forte pour la rédaction de ce live report !