Contrairement à ce que leur nom (référence au paradis des marins irlandais) ou leur style (auto-proclamé irish speedfolk) laissent à penser, Fiddler’s Green est bien un groupe allemand. Ils officient depuis les années 90, et leur punk-rock celtique est dans la droite ligne des Dropkick Murphy’s ou des Real McKenzies. C’est donc avec beaucoup d’enthousiasme que j’attendais leur passage à Berlin.
Et pourtant, il faut dire que ça n’avait pas très bien commencé. Coincée dans un bus pour traverser la moitié de la ville, j’angoissais à l’idée d’être en retard, et j’ai d’ailleurs raté toute la première partie. J’arrive au pas de course au Postbahnhof Club, et j’apprends que je n’aurai pas le photopass promis par l’organisation. Je me retrouve donc dans la fosse comme tout le monde, et alors que j’essaie de me trouver une place pas trop naze pour prendre des photos, je me fais refouler par un berlinois hostile qui me fait clairement comprendre que ce bout de barrière lui appartient personnellement, depuis trois générations.
Bref, je ne suis pas tout à fait dans l’ambiance festive du moment lorsque les musiciens de Fiddler’s Green débarquent sur scène. Ils sont six gars habillés en costard noir avec cravate, comme cela se fait souvent sur la scène trad irlandaise. Ça ne fait pas très punk, du coup, surtout que le bassiste a une barbe de hipster et le chanteur des lunettes de comptable. Globalement, l’ambiance restera sage, mais qu’importe puisque la musique est bonne !
Nous avons donc sur scène deux guitaristes, qui alterneront entre électrique, acoustique, mais aussi banjo et bouzouki, un bassiste, un batteur, et deux instruments mélodiques : violon et accordéon. Le violon sera d’ailleurs l’instrument prédominant sur le reste. C’est lui qui assure les mélodies et tisse le lien d’une chanson à l’autre.
Les Fiddler’s Green sont là pour défendre leur dernier album, Devil’s Dozen, c’est donc naturellement qu’ils joueront plusieurs titres de celui-ci, All the way et Mr Tickle par exemple, mais ils reprendront également nombre de leurs plus anciens morceaux, bien connus par les fans. On retrouve parmi elles plusieurs reprises de mélodies traditionnelles irlandaises que de nombreux groupes ont déjà reprises avant eux, telles que The rocky road to Dublin. Mais aussi, plus surprenant, une réinterprétation de Bella Ciao.
Ce que j’aime bien chez Fiddler’s Green, c’est qu’ils font des efforts sur les voix, le chanteur chante juste, et les autres musiciens l’accompagnent, pas seulement pour donner une ambiance de potes de bars qui beuglent ensemble, mais avec de vraies harmonies bien pensées. Je ne m’attendais pas à ce que ce soit aussi bien rendu en concert que sur CD, conditions de live oblige, mais c’était honorable. La voix du frontman, Ralf, s’entendait clairement, et quand ses compères chantaient avec lui, c’était tout à fait audible. Ralf laissera parfois la place à Pat, le guitariste, sur certaines chansons.
Le set alterne des morceaux festifs, où les influences punk, mais aussi ska et reggae, se font clairement sentir, et d’autres plus calmes où les mélodies au violon prennent toute leur ampleur. On aura d’ailleurs droit à un chouette duo violon-bodhran, qui nous rappelle que les racines de la musique de Fiddler’s Green sont avant tout dans le trad irlandais.
Côté ambiance, c’est assez calme, malgré les tentatives du groupe d’interagir avec le public. Ils en viennent même à signaler que le public criait plus fort lors de leur concert de la veille à Hambourg, ce qui a le mérite de réveiller un peu l’assemblée, et la deuxième partie du concert sera plus dynamique. C’est aussi à ce moment que le groupe entonne leurs tubes, tels que The night Pat Murphy died, et ma préférée, Folk’s not dead.
Après deux rappels, le groupe sort de scène et les punks remettent leurs T-shirts par dessus leur cravate. Malgré l’ambiance un peu décevante, c’était quand même un chouette concert.