Ellende – Lebensnehmer

Ellende m’avait particulièrement conquise avec son deuxième album Todbringer sorti il y a trois ans. Dans celui-ci, le projet du musicien autrichien Lukas Gosch (L.G.) s’affirmait clairement comme projet d’« Atmospheric/Post-Black Metal », agrémenté de touches mélancoliques très proches du DSBM, que ce soit lors des passages acoustiques ou orchestraux.

Comme évoqué plus haut, Ellende est initialement un one-man-band créé en 2011 à Graz. En studio, le chanteur et multi-instrumentiste L.G. est secondé par le batteur de session P.F. Les autres musiciens que sont L.B., D.B. et S.L. sont uniquement des membres-live (respectivement guitaristes et bassiste de session). Auparavant, le groupe était signé chez le label Talheim Records, puis est passé chez Art of Propaganda (également label d’Harakiri for the Sky et d’Anomalie) pour son troisième album Lebensnehmer.

Le nom du groupe renvoie à un adjectif du moyen haut allemand issu du germanique occidental « alja-landja » qui peut se traduire par « être hors de son pays ». Dans le sens de « exilé », ce terme a pris une connotation négative avec le temps, et est devenu en allemand moderne « elend », c’est-à-dire « misérable ». Cela explique ainsi le caractère mélancolique dans la musique du groupe, en plus de son attrait pour les thèmes de la nature et de l’existentialisme.

L’ensemble Todbringer / Lebensnehmer pourrait prendre la forme d’un diptyque. En effet, on constate à travers les titres et les pochettes que ces deux albums sont liés : tandis que « Todbringer » se traduit par « Celui qui sème la mort », « Lebensnehmer » signifie « Celui qui ôte la vie ». Sur les pochettes, réalisées par L.G., on retrouve l’imagerie du squelette.

Lebensnehmer a été enregistré et mixé chez Audioriotrecordings en Autriche avec l’aide de Stefan Kaschel, et masterisé aux Iguana Studios en Allemagne avec l’aide de Christoph Brandes.

Ce troisième album est composé de huit morceaux, dont trois instrumentaux d’une durée moyenne de cinq minutes. Les morceaux principaux sont quant à eux d’une durée moyenne de sept minutes. C’est avec un premier morceau instrumental intitulé sobrement « Intro » que l’album commence. On retrouve ici immédiatement le caractère mélancolique cher à Ellende, à travers une mélodie grave des instruments à cordes, tandis qu’une guitare aux élans post-black fait progressivement son entrée en fade-in.

Sans transition, « Augenblick » fait suite avec une intro post-black au rythme soutenu. Comme pour les albums précédents, L.G chante en allemand et adopte un chant black torturé, néanmoins moins criard et moins typé « DSBM » comparé à Todbringer. Musicalement, bien que l’ambiance soit toujours en grande partie mélancolique, on peut constater aussi bien dans ce morceau que dans le reste de l’album qu’un côté épique est davantage mis en valeur. « Der Blick wird leer » se révélera être le meilleur exemple de cette association parfaite entre le mélancolique et l’épique. Certains riffs en fin d’album pourraient justement faire penser au one-man-band de black atmosphérique slovène Veldes, où la frontière entre épique et mélancolie est également très mince. Pour en revenir à « Augenblick », l’album a à peine commencé qu’Ellende nous surprend déjà, avec en milieu de morceau un long bridge acoustique de deux minutes aux élans post-rock à la Alcest, avant une reprise post-black agressive.

Tandis que certains morceaux sont plus « rentre-dedans », comme « Du waerst eine schoene Leiche », d’autres sont au contraire plus posés et mettent l’accent sur l’aspect calme et atmosphérique lors de divers passages acoustiques rappelant par moments Agalloch, comme lors du bridge folk de « Die Wege » ou bien encore lors de l’instrumental « Ein Stueck Verzweiflung ». On sent aussi que Lukas Gosch a plus que jamais le souci de la mélodicité, comme lors de l’intro davantage typée « Black mélodique » de « Der Blick wird leer ».

Comme mentionné plus haut, Lebensnehmer compte trois morceaux instrumentaux, et « Liebkosung des Eiswinds » serait bien le plus intéressant de l’album. Non seulement on retrouve les influences orchestrales mélancoliques qui, à mon sens, font d’Ellende bien plus qu’un simple groupe de post-black, mais en plus, le groupe innove en intégrant des sonorités électroniques étonnantes entre IDM et chill-out. Au milieu des orchestrations menées par les instruments à cordes, des clochettes et du souffle du vent, on sent tout espoir s’envoler.

Lebensnehmer prend fin avec « Atemzug », morceau le plus long de l’album puisqu’il dure neuf minutes. Après plusieurs écoutes, ce sera peut-être bien l’un de mes préférés pour être un parfait condensé de tout ce que j’apprécie chez Ellende. Suite à une introduction mélancolique au piano, le temps semble s’arrêter, on n’entend plus rien pendant une seconde qui paraît être une éternité, puis les guitares font tout à coup leur apparition dans un déferlement de black atmosphérique épique. S’ensuit en milieu de morceau un solo des plus épiques, suivi d’un long bridge folk acoustique lors duquel on peut discerner quelques incursions orchestrales mélancoliques menées par les cuivres et le piano. L’album finit comme il a commencé, sur une tonalité mélancolique, avec une conclusion où s’associent violoncelle et guitare acoustique.

On retrouve dans Lebensnehmer tout ce qui fait le charme et l’identité d’Ellende : le sens de la mélodie, la mélancolie associée à l’épique, ainsi que l’utilisation intelligente et raisonnée des influences acoustiques et orchestrales. Toutefois, le groupe n’a manifestement pas manqué d’inspiration pour ce nouvel album, la preuve en est avec ces incursions post-rock et électroniques surprenantes.

Fée Verte

8/10

Tracklist :

  1. Intro
  2. Augenblick
  3. Die Wege
  4. Ein Stueck Verzweiflung
  5. Der Blick wird leer
  6. Liebkosung des Eiswinds
  7. Du waerst eine schoene Leiche
  8. Atemzug

Sortie le 29 mars 2019

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