Le premier contact que j’ai eu avec cette formation fut bref. Je voguais au milieu de la longue liste d’album à chroniquer, j’ai écouté vite fait n’y portant que peu d’attention, et quelle fut mon erreur ! Depuis ma deuxième approche, Cesair ne cesse de me vendre du rêve, toujours plus.
Je les ai vraiment découverts en concert à Trolls et Légendes, et ceux qui ont lu le live report savent toute la joie qu’ils m’ont procurée ! J’ai donc décidé avec un entrain certain de me plonger dans leur premier opus, « Dies, Nox et Omnia » et trois semaines plus tard je n’ai toujours pas refait surface tant l’univers que nous propose les Néerlandais est riche et plein de justesse.
J’ai récemment chroniqué un album de Pagan Folk tout ce qu’il y a de plus basique, avec moult reprises de musiques traditionnelles, et je ne peux que constater que le talent ne fait pas tout, il faut l’associer à une bonne dose d’originalité et le marquer de sa personnalité, pour un résultat unique et transcendantal. Et tudieu, Cesair le réussit à la perfection. L’album contient treize titres (dont un prologue) nous faisant voyager à travers toute l’Europe au son d’anciennes musiques ou poèmes traditionnels suédois, espagnols, français, allemands ou orientaux. Et après avoir lu le livret du CD, ils ont encore grimpé l’échelle de mon estime. Chaque chanson est accompagnée d’une légende nous précisant l’idée globale des textes et surtout une indication de leur époque et lieu de naissance. C’est tout bonnement fantastique, une plongée dans l’espace et le temps. Point « d’Andro », de « Butterfly » ou une énième adaptation de chanson bretonne, ici le concept est plutôt de se laisser dériver, de la mise en musique de fragments de vers datant du septième siècle d’une poétesse grecque, à une musique traditionnelle espagnole de marin du quinzième siècle, en passant par un poème arabe du vingtième siècle, et j’en passe des plus grandioses ! Je pourrais facilement écrire plus de pages que nécessaire en vous contant avec joie chaque histoire cachée derrière chaque chanson, mais ce serait bien trop long. Passons à ce qu’il nous intéresse la musique.
En plus d’un background riche, Cesair a la diversité musicale qui va bien avec. Leur style est reconnaissable en grande partie grâce à la chanteuse, Monique Van Deursen, qui marque par sa voix aussi éthérée qu’organique. Qu’on soit clair, sa voix est unique. Vous m’direz, toute voix l’est. Hélas non ! Je ne compte plus le nombre de formations à chanteuse qui veulent retranscrire une pureté musicale via une voix immaculée, et qui au final ne transmettent qu’une absence de vie, selon moi. Monique arrive sans mal à conserver une voix pure tout en imprimant un timbre particulier qui fera de chaque chanson un voyage inédit. C’est ainsi que « Minnic Soe Stervic » résonnera de son chant quasi liturgique marqué par une prononciation effacée ne laissant transpirer que les voyelles alors que « Canso » sera marqué de sa voix brute clamant son texte avec énergie et joie de vivre.
Imaginez maintenant qu’on ajoute à ce chant une musique avec les mêmes caractéristiques, des sonorités qui se font aussi bien aériennes que telluriques, et voilà, vous avez un album dont on ne ressort pas indifférent. Je suis encore perdu dans la mélancolie de « Du Som Har », ballade suédoise évoquant des regrets de jeunesse accompagnés d’arpèges à la guitare, d’un accordéon étirant ses tristes notes à l’infini avec la même délicatesse que le violon soutenant ces mélodies d’une vibration lancinante. Heureusement, le sourire rejoint mes lèvres dès les premières notes de « The Wanderings Of Oison » où la guitare et le violon se mêlent en un rythme sautillant suivant cette voix pleine de vie pour éclater, après seulement 30 secondes, en un refrain plein d’allégresse, sentiment sans cesse grandissant au fur et à mesure des notes. Je quitte subrepticement mon corps dès les premières vibrations de cordes du bouzouki d’« Atiny Naya » pour être transporté dans une contrée aride aux mille et une dunes de sable. L’hurdy gurdy s’invite dans la danse et le mystère s’épaissit tandis qu’une certaine transe émane de ce titre au relent d’orient qui fait monter la pression par un rythme grandissant stoppé net par le tintement des zills (sorte de cymbale de doigt) qui étire plus que raison leurs sons clairs et aigus. Probablement mon titre favori de l’album.
A l’image des textes, je pourrais vous raconter la charge émotionnelle de chaque chanson mais il serait judicieux que vous la découvriez par vous-même.
Cesair est, dans la mythologie mésopotamienne, fille d’Ishtar déesse de l’amour et de la guerre. On dit d’elle que son cœur contient tellement d’amour qu’elle le partage avec quiconque y est ouvert. Ici, Cesair n’a pas d’ascendant, jeune formation néerlandaise, je dis d’eux que leur musique est si unique, si belle et si juste qu’elle contentera n’importe qui sera assez intelligent pour ne pas passer son chemin. Alors je vous exhorte à plonger pleinement dans le monde qui est le leur pour une bonne claque auditive du genre qu’on ne prend pas à chaque découverte !
Grymauch
NOTE : 9.5/10
Tracklist :
- Prologue
- Enuma Elish
- Minnic Soe Stervic
- Graeica
- Mal Cascada
- Ishtar
- Bergatrollets Friari
- Du Som Har
- Canso
- The Wanderings Of Oisin
- Atiny Naya
- Dies, Nox Et Omnia
- Y Gododdin
Sortie : 2013
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