Jeudi 30 aout, je sors de la voiture et pose le pied sur le parking du Castlefest tout en m’étendant aussi gracieusement qu’un gnou sous le soleil de fin d’après-midi des Pays Bas. Direction le camping pour aller s’installer confortablement et déjà les réjouissances commencent. On pourrait résumer ca rapidement en disant que ce festival bénéficie d’une organisation quasi parfaite mais vous ne comprendriez pas à quel point s’en est jouissif. Premier fait, qui est probablement à attribuer à la mentalité du pays et de ses habitants, c’est putain de propre. J’ai été en vacances dans des campings 3 étoiles qui n’ont rien à envier au site du Castlefest. De la pelouse bien grasse (notez tout de suite que je ne ferais aucunes allusions dans ce report à l’herbe, celle qui se fume), des poubelles posées à endroits stratégiques et régulièrement vidées, des sanitaires en quantité et avec chasse d’eau, qui ont toujours été propres même sur le festival (sauf quand je suis passé derrière toi, cher monsieur, il ne faut pas abuser du chili con carne) et des douches, en nombre, chaudes, et dont les festivaliers ont assez de jugeote pour ne pas rentrer avec leurs chaussures dedans ! Je ne m’étendrais pas plus sur le camping, de toutes manières ma tente est en place il est temps d’aller chercher les bracelets et de découvrir la petite partie du festival ouverte pour ce jeudi soir !
L’entrée est des plus sobre (et ne ressemble même pas à une entrée d’ailleurs) et débouche directement sur un morceau de marché à tendance médiéval. A tendance parce qu’entre le stand de vente d’hydromel, les marchands de pièces d’armure, le forgeron etc… on peut y trouver des stands de fringues goth et d’époque victorienne, un marchands de kilts d’Ecosse (genre fait sur mesure devant toi), et plein de petits stands insolites comme celui de Magic Within qui confectionne des fées lutins et autres dryades à l’aide de végétation séchée et de pâte filmo pour un réalisme à couper le souffle.
L’allée du marché touche à sa fin et l’on arrive sur une grande place avec la forest stage, les stands de miam, les bars, et les machines de distribution de jetons qui sera l’objet du premier et seul gros bémol du festival, le prix des consos et de la bouffe. Un billet de 50 euros nous donne 20 jetons. En comptant deux jetons et demie pour le repas le moins cher et un et demie pour un godet d’hydromel ça fait vraiment peu et si on ne fait pas attention, on a vite fait d’être ruiné !
C’est pas tout ça mais la musique dans l’histoire ? Justement, j’ai pu assister au dernier concert du jeudi (Il y en avait deux) assuré par Afro Celt Sound System. Et oui c’est aussi déroutant en musique que ce que le nom promet ! Au programme, un mélange de trad irlandais et de percussions de la savane dans une rythmique qui frôle parfois la dance music des années 90 ! Quoi en dire ? Je ne peux me prononcer clairement parce que je ne sais pas si j’ai aimé ! Parce que bordel, les battle d’irish flute et de djembé était tellement puissant ! Mais pourquoi est-ce que le jeu de scène des membres africains ressemble autant à la BD de Tintin au Congo ? Ce n’était vraiment pas néssécaire de taper dans le cliché à ce point…. Mais en même temps le bodhran et la kora (instrument a corde originaire d’Afrique de l’ouest) se marient si bien ! Mais pourquoi est-ce que certains titres me font penser à un mix raté entre Tri Yann et Johnny Clegg ? Vous l’aurez compris, entre les deux mon cœur balance ! Mais c’était quand même une bonne expérience !
Ce jeudi touche à sa fin, et c’est plein d’allégresse que je rejoins ma tente dans le silence, car oui, à partir de 23h c’est silence ! Mais pas de panique les plus braves peuvent se défouler dans la zone « Chill Out » du camping aménagée d’une boite de nuit à casque audio, d’une tripotée de table et d’un bar ! Aller bonne nuit !
Un réveil en douceur, une bonne douche chaude, le temps d’aller faire quelques courses et me voilà d’attaque pour commencer le Castlefest ! On commence donc les festivités avec :
Irfan
Ma capacité naturelle d’orientation me mène à la « folk stage » par le chemin le moins direct et c’est donc en plein milieu du set que je me pose face à la scène sur un terrain légèrement en pente, il ne faut donc pas être trop petit si on est pas devant ! Mais bref j’assiste donc à un show très court pour ma part à l’atmosphère éthérée très typée orientale. La faute au joueur d’Oud qui pose ses mélodies envoutantes qui nous transportent par-delà la mer en ces contrées arides toutes vêtues d’or. Et c’est sans compter sur la percussion à la darbuka et le duo de chant très chaud masculin et très perçant féminin. Malheureusement même si la musique fait son office j’ai du mal à rentrer dans l’ambiance et la fin imminente après 3 chansons n’aide pas… Ce fut tout de même une mise en bouche fort agréable qui, si elle ne m’a pas transcender, m’a bien fait comprendre que ce trois jours à venir aller m’emmener loin dans le pays des rêves et des merveilles.
Ensuite vient le moment de flâner sur le site du festival. D’ailleurs, pourquoi Castlefest ? Et bien parce que l’évènement prend place dans les vastes jardins du château Keukenhof à Lisse. C’est donc avec une joie indicible que l’on se surprend à errer dans des allées ombragées aux alentours d’un château somme toute modeste mais qui en impose dans le cadre d’un festival !
Aller, juste le temps d’aller chercher une assiette de légumes frits sur son lit de riz et sa sauce je n’sais quoi (Le stand vegan, le plus rentable niveau quantité/prix et en plus c’est vraiment bon !) et l’heure du prochain concert approche ! Et pas des moindres !
Cesair
Dire que Cesair est le groupe que j’attends le plus est un sacré euphémisme. Depuis que je les ai découverts à Trolls et Légendes, ils ne cessent de grandir dans mon estime tellement leur musique est humble, juste et puissante ! Le temps de trouver la village stage (L’orientation, même avec un plan c’est pas ça …) et le premier titre a déjà commencé, « Dies Nox Et Omnia » ! Même pas 10 secondes que je suis arrivé et je suis déjà conquis par ce titre. Chaque musicien est totalement dévoué à son instrument et transmet une énergie folle. La tension monte sur la fin de ce premier morceau et il se termine sous une ovation générale bien méritée ! Le temps du blabla de bienvenue et malheureusement la chanteuse Monique a décidée de s’exprimer en hollandais ce qui me déçoit légèrement étant donné les nombreuses intros explicatives des différents titres. Au final ça n’entachera en rien la performance et ce fut un peu plus d’une heure d’un set parfaitement maitrisé où la joie de jouer se voit parfaitement bien sur les visages ! Je frissonne encore de l’interprétation d’ « Y Goddodin » qui conte la complainte d’un guerrier ayant perdu ses amis au combat. Monique appose son timbre le plus chaud à cette mélodie à la tristesse infinie, tandis que Sophie au violon fait larmoyer son instrument sans se départir d’expressions de chagrin fort communicatives. Heureusement un titre comme « Canso » vient égayer l’atmosphère et fait allègrement bouger la foule qui dansera du début à la fin du titre ! Et que dire de « The Wandering of Oisin » et son humeur galopante qui imprime automatiquement un sourire de joie sur mon visage, un régale ce morceau ! « Graeica » aura été l’occasion pour Thomas de faire résonner sa voix caverneuse et menaçante en contraste avec la voix de Monique qui monte haut dans les aigus pour une ambiance sombre et incertaine qui tranche totalement avec « Minnic Soe Stervic » qui débute de manière liturgique pour se transformer en une sorte de chanson de marin qui fera s’animer Fieke à l’accordéon de manière improbablement envoutante ! Une petite surprise et voilà qu’Irfan monte en scène pour interpréter « Ishtar », ce qui leur va à ravir étant donné le caractère oriental du titre ! Le set touche à sa fin, je suis comblé et la force de ce festival, c’est que Cesair rejoue le lendemain ! Et encore le surlendemain ! Yeah !
Folk Noir
Cette fois ci pas d’erreur de route je retrouve facilement la forest stage et arrive en avance pour Folk Noir, groupe de Neo Folk avec Oliver S. Tyr, membre de Faun, au chant ! Ce quatuor interprète des ballades plus ou moins énervées soutenues par des sonorités plutôt originales pour le style ! Par exemple, à qui viendrait l’idée de mettre une disto sur un bouzouki ? Ba Folk Noir le fait et ça rend bien ! Enfin, c’est très spécial, ça diffuse un genre de brouillon sonore à la mélodie tout à fait claire et donne un fort caractère sauvage et indomptable à l’ensemble. Il n’y en a pas partout, juste deux ou trois chansons mais c’est assez original pour marquer les esprits. Mais au final je dois dire que personnellement je n’ai pas été transcendé. Le set se laisse écouter sans problème mais j’ai trouvé par moment que c’était trop convenue comme musique. Les titres s’enchainent, ne se ressemblent pas mais ont tous un léger écho malgré les différents instruments utilisés. Il y a même eu en guest, Kaat de Leaf à la Nyckelhapra pour interpréter, il faut bien l’avouer, l’excellent « Dear Misery ». C’est donc d’une oreille parfois distraite parfois attentive que j’ai suivi le set jusqu’à sa fin, appréciant tantôt la mélancolie, tantôt la joie des chansons sans jamais me lever pour me trémousser parmi une foule conquise.
La Horde
Ah ! Les joyeux lurons de La Horde ! J’avais quelques appréhensions à les voir en terre non francophones étant donné que le principal ressort de scène se joue sur des jeux de mots, calembours et l’incroyable capacité d’Arno à raconter des conneries ! Et j’ai à moitié eu raison… J’ai senti La Horde pas autant au taquet que j’ai pu les voir auparavant ! Et c’est dû, je pense, à un public pas trop réceptif malgré un certain nombre de personnes francophones. Pour ma part je suis toujours entièrement satisfait dès que « Prince Ali » d’Aladdin est jouée. C’est toujours la même qualité musicale que le trio (accompagné d’un nouveau batteur et d’une gente dame à la vielle à roue) nous sert ou se mélange pop culture des années 90 et l’étonnant morceau du générique de Musclor, un petit medley de disco version instrument trad, et des chansons qui pourrait s’apparentées à des chansons de pubs ou de marins suivant votre inclinaison ! En bref de la bonne humeur, qui est pour le coup un peu freiner par ce manque de réactivité. Mais c’est sans compter sur Arno qui fait le show avec toujours autant de ferveur jouant de son accent et de sa syntaxe anglaise plutôt risible qui se fait même rattraper par Mathieu histoire de recentrer les choses ! J’adore ! C’est ainsi que, sans surprise, le set se finit après une heure presque et demie de set (et un match de tennis, les vrais comprendront) avec « Pour La Horde », en beauté et dans la joie !
Omnia
Après deux heures de battements et un bon repas dans l’bide me voilà de retour à la village stage pour voir les détenteurs en titre du groupe le plus adulé du style, Omnia ! Note préalable : Je ne jugerais ici que la performance du jour sans plus d’objectivité que cela, car pour un groupe de leur renommé il en faut, de l’objectivité, pour appréhender la bête ! Pour plus de perspective il faudra se reporter au concert du dimanche car oui comme pour Cesair, Omnia rejoue dans le week end ! Ce festival est génial.
J’arrive pendant les balances et que vois-je ? L’indomptable Fieke de Cesair en train de régler le son de la vielle à roue ! Putain mon cœur fait un bon dans ma poitrine ! Oui ! Omnia à abandonné la vielle depuis quelques temps déjà en live au profit du piano ce qui change grandement l’ambiance ! Mais pour l’occasion ce soir, il y aura de la vielle ! Les balances prennent fin, puis le groupe entre en scène, d’abord Rob qui pose un rythme à la percussion, puis Satrya qui s’arme de sa guitare, vient ensuite Daphyd et son didgéridoo, pour finir sur l’emblématique couple que forme Steve et Jenny, cette dernière se positionne à la harpe, Steve empoigne une flute et « Fee Rah Huri » ! La foule se met instantanément à danser et cette joyeuse mélodie emplit l’air et la charge en excitation ! Et en plein milieu de ladite musique qui vois-je arriver ? Joe Hennon ! Ancien guitariste d’Omnia vient prêter son doigté expert le temps d’un set ! Et il ne sera pas venu pour rien car on a le privilège de se voir jouer un titre que lui seul est autoriser à jouer (c’est l’patron Steve qui l’a dit…) qui n’est autre que l’intro « Were You at the Rock ? ». Ces doux arpèges de guitares sonnent comme du miel à mes oreilles ramenant pour un temps l’atmosphère d’un Omnia d’antan. Comme dit précédemment c’est une intro ! Le titre en question est bien évidemment « Richard Parkers Fancy » et sa sauvagerie exponentielle ! Qu’est-ce que ça a pu remuer la foule ! La setlist est composée des grands classiques et de pas mal de titres du dernier album dont l’infâme « Crazy man ». Sérieusement, cette chanson m’insupporte avec cette voix de crécelle que nous balance Steve… Bref, passons ! Rappelez-vous, les balances ont vu le réglage d’une vielle à roue ! C’est ainsi donc que les premières notes de bouzouki résonnent et Steve qui ne cesse de haranguer la foule entre les chansons nous balance un « Castlefest ! Do you feel alive today ?! ». Ovation du tonnerre la chanson débute dans ce premier couplet empreint de poésie, Fieke entre en scène au son de la vielle et oui putain ! Je me sens vivant ! Cette dernière était à l’honneur dans d’autres titres tels que « I Don’t Speak Human » l’excellentissime « Dance Until We Die » ou le cultissime « Wytche’s Brew » ! Tout ça amène beaucoup de joie, et parfois Omnia sait changer d’atmosphère. Même si l’allégresse ne traine pas loin c’est la folie et l’incertitude qui a pris le pas lors de « Toys in the Attic » qui fait traîner un lyrisme mélancolique plus que bienvenue dans l’air. Et il y a eu « Auta Luonto » son énergie grandissante, son rythme effréné et ses paroles psalmodiées qui engourdit l’esprit dans une transe incontrôlée ! Et puis un moment, Steve nous questionne (Il n’y a que lui qui parle en fait…) « Quelqu’un aurait un verre de Whisky ? Non personne ? Et personne n’a roulé de pétard ? Ah ! » C’est donc la dessus qu’un bougre se fait taxer son joint qui servira d’intro à « Black House » chanson traitant des addictions sur fond de Blues moderne ! En parlant de ca, le dernier album était bien à l’honneur aussi étant donné que la moitié de celui-ci a été joué sur scène ! « Kokopelli » et son ambiance tribal dû à la Fujara, « Babu Bawu » qui se rapprocherait presque d’« Auta Luonto » dans l’idée, le tube reggae « Earth Warrior » ou « Call me Satan » et sa flute épileptique !
Voilà, Omnia en concert c’est une grosse dose de « tube » du groupe, une énergie fracassante, un set parfaitement maitrisé, un show carré, et des musiciens qui sont totalement heureux d’être là et ça se voit ! Rendez-vous dimanche pour plus de perspective !
Euzen
C’est donc tout léger que je quitte la Village stage pour la Forest stage ou s’apprête à jouer Euzen ! La seule approche que j’ai eue préalablement avec cette formation se limite à quelques titres écoutés sur youtube et même pas en entier parce que j’ai pas accroché. C’est donc pour finir la soirée avec un fond musicale que je me pose dans l’herbe avec un bretzel au formage et un bon godet d’hydromel ! Et en fait, il se trouve qu’en live, Euzen envoie la sauce comme je ne m’y attendais pas ! Le quintet danois balance un genre de rock expérimental teinté de sons électro soutenu par Maria Franz au chant qui contribue de sa voix puissante à distiller des ambiances tantôt inquiétantes tantôt planantes. C’est donc assis dans l’herbe en pleine restauration que je me suis pris quelques claques auditive, de celles qui te font oublier d’avaler tellement l’envoutement par la musique est puissant ! Malheureusement pour moi, un seul concert de programmé pour Euzen, il me faudra attendre l’an prochain pour apprécier pleinement leurs show au Castlefest !
Voilà, une première journée se termine et je suis déjà certain que ce festival sera un incontournable pour moi et aussi et de loin mon favoris. Peu de groupe programmés pour trois jours de musique mais vu que plusieurs passent tous les jours, impossible de les rater ! Et cette ambiance ! Le Castlefest est avant tout un évènement familial, que ce soit niveau fréquentation, les festivaliers sont de tout âges et un sentiment de paix et de respect plane sur tout le site, mais aussi au niveau des groupes. Beaucoup ont déjà des liens entre eux avant ce festival et ils s’entraident tous, s’envoyant des fions amicaux, allant jouer le temps d’un morceau chez les copains etc… et merde c’est beau ! Le résultat en est une cohésion impressionnante et une joie de vivre indéniable.
Mouais, je suis un éternel putain de hippie dans l’âme. Et ce n’est que le vendredi !
Report by Grymauch