Varulven :
Alors que l’été et le beau temps semblaient être revenus depuis une semaine sur la capitale, Garmonbozia se mit en tête d’apporter un peu de brouillard et de tumulte en cette journée du 15 mai, avec la venue des Polonais de Mgla, accompagnés pour l’occasion de leurs compatriotes Doombringer et par les Canadiens de Revenge. Arrivé aux alentours de 16h30 au Petit Bain, je comptais bien profiter du beau temps en flânant sur les quais de Seine. Puis, aux alentours de 18h, je commençais tout doucement à rejoindre les quelques personnes qui commençaient à arriver au Petit Bain, avant que les portes n’ouvrent définitivement une demi-heure plus tard.
Herja :
On est déjà mi-mai et après plusieurs jours d’inconstance météorologique, c’est sous le soleil et la chaleur qu’on se dirige vers le Petit Bain en cette fin d’après-midi. Le temps donne certes plus envie de profiter des quais de Seine que de s’enfermer dans une salle, mais Mgla, Revenge et Doombringer ont attiré du monde. La date Black/Death organisée par Garmonbozia affichait en effet complet plusieurs mois avant le jour J. 18h30, ouverture des portes, il y a d’ailleurs déjà une petite queue devant mais le Petit Bain se remplira tout de même assez progressivement durant la soirée.
Doombringer
Varulven :
Une demi-heure après notre entrée dans la salle, les Polonais de Doombringer investissent la scène afin d’ouvrir la soirée. Les connaissant seulement de nom, j’assiste donc à leur set en totale neutralité, sachant que le quintet venait défendre ce soir son nouvel album Walpurgis Fires paru le 20 février dernier. Durant les 45 minutes que dure leur prestation, le groupe, dont les membres sont tous vêtus de simples chemises noires, (à l’exception du chanteur, arborant une chemise à jabot blanche et des colliers en os) nous délivre un Death/Black très efficace alternant passages tranchants et énergiques, leads mélodiques et quelque peu envoûtants et mid tempos lancinants et proches du Doom. On regrettera peut-être une légère redondance sur la fin, ainsi que le jeu de lumières, qui faisait un peu salle des fêtes. Une bonne entrée en matière, avant ce qui va suivre …
Herja :
Side-project de membres ou ex- de Culte des Ghoules et Bestial Raids, Doombringer ouvrent les hostilités avec un set Black/Death propre et carré. Bon, leur musique est clairement plus Black, mais certains riffs et parties vocales plus profondes, en particulier les vocaux additionnels du bassiste, justifient la mention Death Metal. Ne connaissant que de nom, je découvre en direct : c’est énergique, bien composé, les morceaux sont assez variés avec plusieurs changements de rythme sans pour autant perdre en efficacité. Le chant joue lui aussi sur plusieurs registres, le leader Medium Mortem passant par des phases possédées où il déclame son texte avec un ton quasi religieux, passages qui m’ont rapidement fait penser à Bölzer. Outre cela, il est également le principal atout scénique du groupe, avec une attitude assez théâtrale (petite courbette avant de sortir de scène, etc), qui m’aura quelques fois fait hausser les sourcils sans pour autant que cela porte réellement préjudice. Un bon démarrage pour cette soirée donc, mais rien qui ne m’aura vraiment marquée non plus.
Setlist:
Unnatural Acts of Flying / Into The Woodlands / Briceia Chants the Spells / Children to Moloch / Red Vapour Fills The Skull of The Cadaver / Samhain Melancholia / Ominous Alliance / Stupor Infernal / Seven Evil Spirits
Revenge
Varulven :
Alors, autant tuer le suspens tout de suite, j’ai beau être un grand fan de Black Metal, et de Metal Extrême au sens plus large, je n’ai jamais compris l’engouement que pouvaient avoir les gens pour toute la scène War Black et Bestial Black, scène dont Revenge fait partie, aux côtés des Blasphemy, Conqueror (pré Revenge) et autres Beherit. Ayant déjà vu (ou plutôt subi) le groupe lors du Fall Of Summer 2016, c’est donc prudemment que j’attaque le set des Canadiens, le trio débarquant sur scène pour nous asséner leurs compos brutales, haineuses et sans concession. Car je ne peux le nier, le groupe a tenu toutes ses promesses, ce fut brutal, haineux, sans concession à souhait (peut-être même un peu trop, quand on voit le QI de certains membres du public), mais je rencontre avec Revenge le même problème qu’avec la plupart des groupes du genre. Oui, les éléments que j’aime dans le Metal Extrême sont présents, la noirceur, le côté old school et spontané, l’aspect plus viscéral, mais tous ces ingrédients sont tellement poussés à l’extrême qu’on a presque l’impression d’écouter une parodie. C’est d’ailleurs ce que j’ai souvent reproché à ces groupes et à leur public, l’impression de toujours en faire trop dans le purisme absolu et la violence musicale. Bref, je me serai donc globalement ennuyé durant ce set, qui fort heureusement passera très vite, en partie grâce au côté très brut et spontané de la musique des Canadiens. Au suivant !
Herja :
J’appréhendais plus ou moins de la même manière que mon collègue la venue de Revenge, dont je partage assez l’avis sur cette branche du Black Metal (et sur son public). J’y allais à reculons et… Ok, c’est répétitif (blast et riff, break, solos assez similaires, etc), bas du front sans fioritures ni élaboration, parfois à la limite du bruitisme, mais j’étais ce soir beaucoup plus réceptive à cette déferlante de haine pure que lorsque j’avais malencontreusement découvert l’existence de Revenge. C’est justement cette absence totale de compromis qui m’a prise aux tripes ce soir. Le son était de plus particulièrement bon, chose importante à souligner car permettant de distinguer un peu ce qu’il se passait (même si les dégeulements additionnels de Haasiophis étaient parfois un peu en retrait). Ça matraque de tous les côtés, ça ne s’essouffle pas une seule seconde alors que le temps de jeu des Canadiens était assez long. Et oui, ok, peut-être qu’être de mauvais poil ces derniers jours m’a rendue plus réceptive au groupe.
M’étant rabattue dans le fond de la salle (et étant de petite taille), je ne peux malheureusement (ou heureusement ?) pas vous conter les potentielles aventures du pit. Et tant mieux, parce qu’on s’en fiche. On en retient un set raw d’une intensité et d’une sauvagerie difficilement oubliables servi par un son impeccable !
Mgla
Varulven :
Car si je suis là ce soir, c’est avant tout pour les Polonais de Mgla, que je n’avais plus revu depuis leur passage à Paris en mars 2016, aux côtés d’Aosoth et Deus Mortem. En effet, je fais partie des nombreuses personnes ayant été véritablement charmées par leur dernier-né Exercises in Futility, qui a réussi avec son grand frère With Hearts Towards None à se hisser parmi mes albums de Black préférés aux côtés de certains classiques du genre. Après avoir effectué ses balances à visage découvert, M, Darkside et leurs musiciens investissent les planches, encapuchonnés et cagoulés comme de rigueur.
Sur une scène baignée par des lumières bleutées allant de paire avec l’atmosphère dégagée par le groupe, les Polonais nous tiennent en haleine durant une heure grâce à leurs compositions nihilistes et glaciales, où se mêlent mélodies imparables, passages black conquérants et arpèges sombres et dissonantes, donnant un côté beaucoup plus noir et orthodoxe à la musique du groupe. Le quintet pioche dans ses trois albums ce soir, jouant la quasi intégralité d’EIF (la glaciale « EIF I », la lancinante « EIF II » et l’épique et conquérante « EIF IV » m’ayant certainement fait le plus d’effet), mais aussi des morceaux de WHTN, avec « WHTN I » et son côté décadent et nihiliste, mais rempli d’un feeling très épique et le classique « WHTN VII », avec un aspect plus froid et mélancolique.
Des morceaux beaucoup plus bruts issus du premier album Groza et des EP furent également joués, apportant ainsi un aspect plus cru et sombre face à l’aspect plus travaillé des morceaux plus récents. Durant toute la prestation, le son demeure excellent et très propre, parfois même un peu trop (j’ai ainsi pu me passer des bouchons d’oreilles c’est dire), cela n’affectant en rien l’aspect beaucoup plus brut et organique de la prestation, beaucoup plus brut que sur album, où l’immersion et l’aspect plus émotionnel restent les maîtres-mots. Après un ultime morceau, le groupe nous quitte donc sans dire un mot, nous laissant retrouver le chemin du retour avec l’esprit encore pensif et plongé dans une profonde introspection.
Herja :
Il aura fallu attendre un bon moment avant que les Polonais n’investissent la scène. Mgla est la raison de ma venue ce soir, ayant été profondément marquée par leurs deux derniers albums d’une intensité et d’une maîtrise rares, propres à l’introspection. Et en live, ils démontrent bien vite leur capacité à imposer cette atmosphère si particulière, glaciale et intransigeante, en ouvrant le bal avec « Exercises in Futility I ». On ne va pas se mentir, leur attitude sur scène y joue beaucoup : les désormais célèbres cagoules, visages masqués, perfectos de cuir, et surtout ce stoïcisme à toute épreuve leur conférant une certaine aura tout en faisant disparaître l’humain au profit de la musique. Stoïcisme qui cependant ne se retrouve pas trop dans le public … Il faudra m’expliquer ce qui donne envie de pogoter ou de sauter sur place chez Mgla. Du côté des Polonais, pas d’interaction, pas de pause, leur prestation est un flot ininterrompu qui submerge à coups de leads mélodiques et hypnoptiques, lumineux, au milieu de morceaux transpirants de négativité. Ces leads ressortent particulièrement bien grâce à un bon son (au premier rang, on aura cependant du mal à entendre les vocaux de M.), retranscrivant parfaitement les compos studio et tout ce qu’elles portent en elles.
Niveau setlist par contre, elle semble être la même depuis un bon moment, ce qui peut finir par lasser. Ce n’est pas (encore) mon cas, mais j’aurais bien aimé qu’elle soit un peu moins centrée sur le dernier album en date pour laisser un peu plus de place à With Hearts Toward None (dont on n’aura eu droit qu’à deux morceaux. Un petit « With Hearts Toward None III » n’aurait par exemple pas été de refus). Bon, il s’agit surtout d’une préférence personnelle, s’agissant de mon album préféré … Et Mgla fait au final bien le tour de sa discographie avec « Mdłości II » et « Further Down the Nest II » pour représenter ses deux EP, ainsi que « Groza III » pour le premier album.
Après avoir conclu avec l’entêtant « Exercises in futility V », les Mgla sortent de scène aussi simplement qu’ils y sont entrés, et le public parisien se disperse doucement.
Setlist :
Exercises in futility I // Exercises in futility IV // Mdłości II // With hearts toward none I // Exercises in futility II // Groza III // With hearts toward none VII // Exercises in futility VI // Exercises in futility V
Encore une belle soirée signée Garmonbozia, merci à eux !