On ne présente plus les Irlandais de God Is An Astronaut qui se sont imposés comme l’un des groupes ambassadeurs du post-rock depuis leur formation en 2002. Pour ceux dont ce ne serait pas l’un des styles de prédilection, une petite piqûre de rappel s’impose : God Is An Astronaut (GIAA pour les intimes) a été créé par les frères jumeaux Niels et Torsten Kinsella (respectivement bassiste et guitariste/pianiste/claviériste). Ils ont très vite été rejoints par le batteur Lloyd Hanney. Le nom du groupe réfère à une réplique du film Cabal de Clive Barker.
Le huitième album Epitaph, sorti le 27 avril 2018, marque un tournant dans la carrière du groupe, tout d’abord pour être le fruit d’une nouvelle collaboration avec le label Napalm Records, après avoir enregistré tous ses albums précédents sous son propre label Revive Records. De plus, on observe dans cet album une progression dans le style du groupe, tout en restant fidèle à son identité. Les fans pourraient s’attendre à une continuité avec l’album précédent Helios | Erebus sorti en 2015, mais le groupe ne pouvait qu’évoluer suite aux tragédies qui ont récemment frappé certains de leurs proches. La pochette de l’album, réalisée par l’artiste français Fursy Teyssier (Les Discrets), retranscrit ainsi parfaitement l’ambiance mélancolique qui en émane.
Pour ce nouvel album, le trio s’est entouré du groupe Xenon Field pour le sound design, de l’ancien membre Jamie Dean pour le piano et les claviers, et des guitaristes Jimmy Scanlon et Brian Harris.
L’album commence avec le morceau-titre « Epitaph » qui avait été choisi comme premier single pour représenter celui-ci. Le nom du morceau est évocateur et plante le décor. On retrouve dans l’introduction le côté planant et mélancolique des claviers, ainsi qu’un rythme électronique typé IDM. Soudain, l’ambiance devient beaucoup plus sombre, lors d’une phase plutôt orientée post-metal où les riffs de guitare sont lourds et oppressants. On découvre alors une nouvelle facette du groupe, bien plus solennelle, et qui pourrait ainsi faire penser à des groupes comme Godspeed You! Black Emperor. Puis les claviers sont de nouveau lumineux et les chœurs lointains, et le final du morceau se révèle intense et onirique avec le superbe combo guitares/claviers. « Epitaph » retranscrit donc à merveille les sentiments de perte et de peine, tout en apportant de l’espoir.
« Mortal Coil » reste dans la continuité du premier morceau, où l’on sent que le son de God Is An Astronaut est plus « étouffé », moins lumineux, toujours à la frontière avec le post-metal. Ce morceau explore le thème de la libération et le soulagement que l’on peut ressentir à travers le suicide après avoir enduré tant de souffrances de son vivant.
« Winter Dusk / Awakening » est le premier morceau de l’album qui a été composé. Tout au long de celui-ci, on a comme l’impression d’entendre le souffle du vent. La vrille lors de la montée instaure une atmosphère oppressante.
« Seance Room » apparaît comme le morceau de transition entre les trois premiers et les trois derniers titres d’Epitaph. Pour la première fois depuis le début de l’album, les guitares sont rapides et énergiques, et les claviers aux sonorités électroniques instaurent un feeling très proche de la synthwave.
Vient ensuite « Komorebi » dont le nom renvoie au mot japonais qui désigne la lumière du soleil qui filtre à travers les feuilles des arbres. Ce morceau très mélancolique mené par les claviers est dans une veine ambiante, et l’on ressent comme un voile qui met une certaine distance entre nous et la musique, telle une métaphore de la nostalgie que l’on peut éprouver pour un endroit, quelqu’un ou quelque chose qui est loin de nous ou qui est sur le point de disparaître.
« Medea » fait référence à Médée, magicienne et épouse du chef des Argonautes, Jason, dans la mythologie grecque. Là encore, la mort est au cœur de la musique de God Is An Astronaut, puisque Médée est tristement connue pour avoir tué son propre enfant. Le morceau est à la fois sombre et mélancolique, de par des ruptures de tons avec des sonorités plus graves et menaçantes.
L’album prend fin avec « Oisín », dont le nom renvoie à un personnage de la mythologie irlandaise, et qui est un hommage au cousin de Niels et Torsten décédé tragiquement à l’âge de sept ans. En seulement quatre minutes, les mélodies mélancoliques des claviers provoquent en nous un sentiment irrépressible de tristesse. La seule présence de cet instrument instaure une sensation de simplicité mais transmet en même temps tellement de choses.
God Is An Astronaut a véritablement fait un pas en avant avec Epitaph, peut-être bien son album le plus autobiographique, mais assurément le plus sombre de sa discographie. Cet aspect peut être celui qui déstabilisera le plus les fans du groupe, mais après s’être laissé apprivoiser par l’album au bout de quelques écoutes, Epitaph se révèle être un véritable bijou dans son genre et qui ne peut que vous émouvoir.
Fée Verte
10/10
Tracklist :
- Epitaph
- Mortal Coil
- Winter Dusk / Awakening
- Seance Room
- Komorebi
- Medea
- Oisín
Date de sortie : 27/04/2018
Liens du groupe :
http://godisanastronaut.com/
https://www.facebook.com/godiaa/
Enfin une analyse sur God Is An Astronaut et une bonne en plus ! Bravo à vous ! C’est vrai que cet album est magique quand même
Merci beaucoup du compliment, ravie que cette chronique t’ait plu 🙂