[EXCLUSIVITÉ FRANÇAISE !!!] Sojourner – Premonitions

Fin 2018, Sojourner rejoignait le label Napalm Records, après avoir sorti ses deux premiers albums, Empires of Ash et The Shadowed Road, chez Avantgarde Music. En apprenant cette nouvelle, mes sentiments étaient partagés : j’étais bien entendu ravie que mon groupe chouchou passe d’un label underground à un géant de la scène rock/metal car cela lui apporterait assurément davantage de moyens pour mener à bien ses projets (c’est d’ailleurs grâce au label autrichien que le groupe a pu tourner son tout premier clip) ainsi qu’une couverture médiatique et promotionnelle non négligeable. D’un autre côté, je ressentais une légère appréhension, car je craignais que ce changement de label aliène quelque peu l’identité musicale de Sojourner que j’affectionne tant.

Pour le troisième album intitulé Premonitions, le line-up studio du groupe reste inchangé. En revanche, Sojourner officialisait en mars 2019 la présence de Scotty Lodge en tant que bassiste live du groupe.

Sojourner a une fois de plus fait appel à Sebastian Luca (Bast) pour réaliser la pochette de l’album, mais cette fois-ci, le groupe délaisse ses châteaux en ruine pour un artwork mystique représentant un couple face à un hibou géant sur un ponton, au beau milieu d’une forêt en pleine nuit. Les points dorés qui ornent les pattes de l’animal font penser à une constellation, comme si le couple était victime d’une vision.

Une fois encore, c’est Øystein G. Brun (Borknagar) qui a pris en charge le mixage de l’album, ainsi que le mastering, au Crosound Studio à Bergen en Norvège.

Si l’on reconnaît la patte musicale de Sojourner dans Premonitions, le groupe présente ce nouvel opus comme son album le plus personnel jusqu’à présent. De plus, bien que la musique du quintet ait toujours été solennelle, celle-ci prend ici une direction plus sombre et mélancolique qu’auparavant. Cette ambiance est notamment véhiculée par le piano et les claviers, éléments-clés de la musique de Sojourner (« Fatal Frame »), mais aussi par quelques riffs de guitare (« The Monolith »). Cet aspect sombre se retrouve également à travers les paroles, avec les thèmes du désespoir, du contraste entre la lumière et l’obscurité, mais aussi de l’onirisme, le mot « dream » apparaissant à plusieurs reprises. Toutefois, le groupe ne délaisse pas pour autant son côté épique (solo de guitare de « Eulogy for the Lost »).

Premonitions peut être vu comme une combinaison parfaite des éléments que l’on appréciait déjà dans les albums précédents. Emilio nous bluffe toujours autant avec son growl puissant, tantôt caverneux, tantôt criard. Les interventions vocales de Chloe, toujours placées à bon escient, se font plus nombreuses qu’auparavant, et ce, pour notre plus grand plaisir, la demoiselle représentant clairement une plus-value dans l’identité musicale du groupe. C’est d’ailleurs la chanteuse qui a la charge d’ouvrir l’album, sur une introduction au piano. Mais c’est sur « Talas », mon morceau préféré de l’album, que Chloe exprime selon moi tout son potentiel. La chanteuse a décidément gagné en assurance et sa candeur est absolument touchante. Cette très belle ballade où se mêlent piano et flûte fait vraiment penser à une musique de film, et la montée épique lors de laquelle Emilio se joint à Chloe est tout bonnement sublime. Pour l’anecdote, contrairement à ce que l’on pourrait penser, « Talas » ne fait pas référence à la bataille qui a éclaté en 751 entre les Arabes et les Chinois près d’une rivière d’Asie centrale, mais renvoie au nom d’un personnage d’un livre que Chloe a écrit, et les paroles font référence à l’amitié vécue dans des moments difficiles et à ce personnage. « Talas » vient d’un mot en grec ancien se traduisant par « misérable ».

A titre personnel, j’apprécie également énormément le morceau précédent, « The Apocalyptic Theater ». Le teaser dévoilé il y a un peu moins d’un an était déjà une excellente mise en bouche, et le résultat final n’a fait que confirmer ce pressentiment. Avec son introduction aux claviers dans la veine de Summoning (on retrouve ces mêmes claviers au début de « The Deluge », premier single de l’album), « The Apocalyptic Theater », c’est du pur Sojourner comme on l’aime. L’entrée épique de la guitare et de la batterie est suivie d’un déferlement de violence, où le growl modulé d’Emilio fait magnifiquement contraste avec le chant épuré de Chloe. Tandis que certains riffs rappellent inexorablement « Homeward », la flûte, toujours présente en arrière-plan, enrichit le black metal de Sojourner de touches atmosphériques et folk. Tout au long de l’album, d’autres passages font écho aux sorties précédentes du groupe, comme par exemple la fin de « Fatal Frame » faisant penser à celle de « Empires of Ash ».

Des grands noms de la scène metal, comme Dan Swanö (Edge of Sanity) et Anders Jacobsson (Draconian), avaient apporté leur contribution sur The Shadowed Road. Sur Premonitions, on peut noter la présence de deux invités. Dans « Fatal Frame », Jostein Thomassen (Borknagar) pose un solo de guitare. A noter que ce morceau, qui est le deuxième single de l’album, est inspiré du jeu vidéo d’horreur Fatal Frame 2 : Crimson Butterfly, dont Emilio est très fan. « Fatal Frame » retranscrit l’atmosphère à la fois oppressante, belle et épique du jeu, dans lequel deux jumelles sont embringuées dans un rituel où elles sont contraintes de s’entretuer, et elles cherchent à tout prix à éviter ce sort tragique. Il s’agit du titre le plus lourd et le plus technique du groupe jusqu’à présent. Sur le dernier morceau, « The Event Horizon », Emilio est secondé par les chœurs épiques de Tom O’Dell (Dwarrowdelf) en fond.

Nouveau coup de maître pour Sojourner qui ne cesse de nous faire voyager à travers sa musique emplie d’émotion. Si je devais émettre un bémol, je dirais que les deux derniers morceaux, bien plus calmes que les autres, cassent le rythme des morceaux précédents et nous coupent dans notre élan. Même si j’apprécie ce que j’entends, « Atonement » et « The Event Horizon » me transportent moins, mais cela n’engage que moi. En tout cas, j’espère que cette saleté de virus ne sera bientôt plus une menace pour que le groupe puisse présenter son nouvel album en live au plus vite !

Fée Verte

9/10

Tracklist :

  1. The Monolith
  2. Eulogy for the Lost
  3. The Apocalyptic Theater
  4. Talas
  5. Fatal Frame
  6. The Deluge
  7. Atonement
  8. The Event Horizon

Sortie : 08/05/2020

Liens du groupe :

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